mercredi 30 septembre 2015

You Only Live Once (j'ai le droit de vivre)

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"Okay kid, we play at your way. But you're gambling with my life and if you're wrong..."

La deuxième réalisation étasunienne de  ne s'éloigne pas trop du précédent sur le plan thématique. Meilleur film1 de la vingtaine écrits et/ou produits entre 1933 et 1940 par le duo -, You Only Live Once s'en démarque néanmoins par le statut d'ancien détenu assumé par le personnage central. Il y est donc question d'innocence et de culpabilité, des notions essentielles mais toujours ambiguës, complexes dans l'univers , mais aussi de l'irrévocable influence (poids) du passé sur la configuration de l'existence à venir. Bénéficiaire grâce à son avocat d'une libération anticipée, Eddie Taylor va enfin pouvoir mener une vie conjugale normale avec son épouse Joan, la secrétaire du juriste. Le couple fête ses retrouvailles dans une auberge au milieu de la nature. Mais le propriétaire, ayant reconnu l'ex-condamné repenti, refuse de mettre plus longtemps la chambre qu'il occupe à sa disposition. A cause d'un retard pris pour visiter une maison à louer, Taylor perd brutalement son emploi de chauffeur routier. Tout en cherchant un travail, il renoue avec d'anciennes mauvaises relations. Un chapeau portant ses initiales est trouvé dans le véhicule abandonné par l'auteur masqué de l'attaque au gaz d'un fourgon de la First National Bank. Traqué par la police, Taylor sait qu'il risque la peine capitale pour ce quatrième forfait dont il se dit innocent. A la demande pressante de Joan, il accepte toutefois de se rendre.
Premier des trois films de  produits par Walter WangerYou Only Live Once est l'un des premiers et rares drames criminels dans lesquels la justice humaine se trouve, de manière aussi subtile et concise, mise sur la sellette. Celle qui néglige de poursuivre les policiers voleurs de pommes (cocasse mais édifiante introduction du métrage), ne permet pas vraiment l'expiation de la faute commise, peut condamner par erreur et inciter au crime un innocent réduit à la dernière extrémité. Le récit évoque aussi incidemment la persistante divergence philosophique entre malfaisance (hobbesienne) et bonté (lockienne ou rousseauiste) naturelle de l'homme. Tant au niveau narratif que formel, un film de  constitue en permanence une leçon de cinéma. La dimension tragique fondée sur l'inexorable cours des événements, la façon dont elle se dévoile précocement, sa figuration au moyen d'éléments symboliques (pluie, brouillard, obscurité...) et naturalistes (étonnante séquence des grenouilles) chers au cinéaste rendent You Only Live Once à la fois profond et singulier.
Malgré quelques effets parfois ostentatoires (à base d'ombre projetée), l'unique collaboration2 de  avec le cinématographe Leon Shamroy3 profite assurément au film. Appréciée aux côtés de  dans Fury4 exploite à nouveau son extraordinaire et vivace faculté de passer naturellement de l'expression d'un immense bonheur à celle d'une infinie tristesse. L'actrice, qui avait entretemps tenu le rôle de Mrs. Verloc dans Sabotage d', est ici judicieusement associée à  (qui avait été l'un de ses partenaires dans The Trail of the Lonesome Pine d'). Le jeune comédien, ancien élève de Dorothy Brando (la mère de Marlon), montre qu'il possède déjà toutes les qualités qui feront de lui l'un des plus remarquables et estimés interprètes de sa génération (et au-delà) le dirigera à nouveau dans The Return of Frank James (1940), le premier des trois westerns qu'il réalisera.

N.B. :
 (Arsenic and Old LaceMildred Pierce) fait ici sa toute première apparition (non créditée) à l'écran,
- il existe une relative parenté scénaristique avec Let Us Live réalisé en  1938 par  pour la Columbia ( et ),
- le film a inspiré le drame turc  (1958).
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1. avec la comédie Ali Baba Goes to Town, sortie la même année.
2. si l'on ne tient pas compte de  pour lequel  fut remplacé par Archie Mayo.
3. le réalisateur, habitué à se montrer très directif avec ses chef-op., le fut encore davantage pour ce film. On lui doit notamment la grande mobilité de la caméra.
4. vedette également du film suivant de You and Me.







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