vendredi 21 août 2015

Amistad

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"... What you don't know and, as far as I can tell, haven't bothered in the least to discover is who they are."

Longtemps (quatorze ans) porté par l'actrice et productrice Debbie Allen (Fame), le projet Amistad finit par attirer l'attention de . Outre l'intérêt des évènements relatés et leur importance pour le processus d'abolition de l'esclavage, le cinéaste voulait, avec ce drame historique, poursuivre l'habituel mouvement pendulaire initié depuis une douzaine d'années entre cinéma commercial (il venait de réaliser le décevant The Lost World, première sequel de Jurassic Park) et artistique1. Sans doute aussi amender quelque peu l'impression laissée auprès du public afro-américain par The Color Purple (1985). Premier film de  produit par DreamWorks2 (structure fondée en 1994 mais seulement opérationnelle depuis peu)Amistad reste l'une des très rares productions de cette ampleur consacrées à ce que l'on nomme la traite négrière atlantique3.
L'étrange procès intenté contre les quarante-quatre survivants de la goélette espagnole "La Amistad" constitue l'argument principal du scénario écrit4 par  (GladiatorKing Arthur). Un débat contradictoire tout à la fois judiciaire que politique et éthique. A qui "appartiennent" ces femmes et hommes emmenés du Sierra Leone vers Cuba par des trafiquants portugais pour être ensuite revendus à des négociants espagnols ? A ces derniers, aux officiers des gardes côtes de Long Island ayant abordé puis appréhendé le navire et ses occupants ou à la jeune reine Isabelle II d'Espagne qui en revendique officiellement la propriété ? La justice doit-elle qualifier de criminelle ou de légitime tentative de libération la sanglante mutinerie menée à bord de l'embarcation ? Quelle incidence les jugements rendus auront-ils sur les relations déjà tendues entre états du Nord et du Sud de l'Union ? Comment interpréter, dans ce contexte spécifique, les droits fondamentaux et constitutionnels de l'homme ?
La dureté, la férocité de plusieurs séquences, dont certaines esthétisées par l'époustouflante photographie de Janusz Kaminski, nous frappe d'emblée. On ne louera d'ailleurs jamais assez l'inestimable apport du natif polonais, oscarisé dès leur première collaboration, comme celui également des discrètes mais remarquables compositions de John Williams, au cinéma de . Ne serait-ce que pour ce trio magique, Amistad mérite largement de nous mobiliser pendant un peu plus de deux heures et demi. La qualité des interprètes réunis (le Béninois 56, le Londonien d'origine nigérienne Chiwetel Ejiofor, futur vedette de 12 Years a Slave, dans sa toute premier apparition au cinéma...) exauce les cinéphiles, leur faisant presque oublier les quelques libertés historiques prises par la production.
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1. en terme de box-office, avec 44M$ de recettes US (pour un budget d'environ 33M$), le film ne se classe d'ailleurs qu'au vingt-troisième rang des réalisations .
2. associé pour l'occasion à HBO.
3. on estime que 13 millions d'africains ont quitté l'Afrique (un peu plus de 11 millions sont arrivés à destination) au moyen de 54 200 traversées maritimes, dont l'essentiel à partir de la fin du XVIIe siècle.
4. à partir de l'ouvrage "Mutiny on the Amistad: The Saga of a Slave Revolt and Its Impact on American Abolition, Law, and Diplomacy" publié en 1987 par l'historien Howard Jones.
6. le rôle de Cinque a d'abord été refusé par Denzel Washington et Cuba Gooding Jr.
7. Sean Connery a décliné la proposition de tenir le rôle de John Quincy Adams, sixième président des Etats-Unis d'Amérique, lui-même fils du président (le deuxième) John Adams.



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