jeudi 25 juin 2015

The Big Trail (la piste des géants)

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"... We're building a nation, we've got to suffer. No great trail was ever blazed without hardship…That’s life!"

Certaines productions ont fondé, au cours des années 1920, le western classique. Parmi elles, The Covered Wagon (1923) tiré par Jesse L. Lasky, le scénariste  et le réalisateur  du roman d', l'également muet The Iron Horse (1924) de . Ou encore cet incroyable film à gros budget1, promu au début de la période de Grande Dépression par Winfield R. Sheehan pour la Fox, qui connut un échec lors de son exploitation initiale. L'ambition du projet était considérable et manifeste. Ecrit par trois illustres inconnus à partir d'un récit d' (le natif de Topeka au Kensas avait déjà été à l'origine de Tumbleweeds, produit en 1925 par William S. Hart), The Big Trail reconstituait en effet, presque en grandeur nature2, la véritable et périlleuse épopée entreprise par des pionniers entre les rives missouriennes du Mississippi et une vallée au pied de montagnes de l'Oregon3.
Afin d'en accentuer le caractère spectaculaire, le film est tourné à la fois en 70mm (dans le format-maison Fox Grandeur utilisé par un petit nombre de salles) et 35mm. Des versions en espagnol, français, et allemand sont simultanément produites avec des réalisateurs et castings spécifiques. L'aguerri 4 est chargé par Sheehan d'assurer la direction de ce risqué western migratoire (la justice vengeresse et une intrigue sentimentale y trouvent une place). Empêché par la Paramount de tenir le rôle principal de Breck Coleman, Gary Cooper est remplacé par un vigoureux quidam5, employé du studio aux accessoires et habitué à faire anonymement le figurant depuis l'âge de dix-huit ans, rebaptisé  pour l'occasion. Les individualités (personnages tenus par vedette féminine des années 1930, le pseudo-Suédois Tyrone Power Sr. - le très dissemblable père de Tyrone Power - dans son dernier rôle et seul film parlant, ...)ont certes leur importance. Mais c'est surtout la cohésion, le devenir de la communauté constituée qui donnent son sens à la narration, fragment d'humanité confronté aux beautés et dangers de la nature (notion concrète), mais aussi à l'immensité (idée abstraite). Et si Cimarron reçut, cette année-là, trois "Oscars" (sur sept nominations aux 4e Academy Awards) dont celui du meilleur film6, une première pour un western, The Big Trail était, bien avant qu'il n'entre en 2006 au National Film Registry, considéré comme l'une des œuvres les plus significatives de l'histoire du cinéma.
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1. de 2M$ et l'emploi de moyens démesurés : 20 000 figurants, 1 800 bovins, 1 400 chevaux, 500 bisons, 725 indiens appartenant à cinq tribus, 185 chariots, une équipe de production de 200 personnes dont 22 cameramen ; orientées par  12 guides indiens, les équipes ont parcouru pendant cinq mois près de 7 000 kilomètres à travers sept états (Arizona, Californie, Wyoming, Idaho, Montana, Utah et Oregon).
2. à l'image de l'incident, car non prévue dans le script, et impressionnant franchissement encordé d'une falaise ; une telle scène n'a jamais été reproduite.
3. un périple comparable est accompli dans The Way West (1967), adaptation du roman d'A.B. Guthrie Jr. par Harold Hecht et .
4. l'ancien acteur est ici associé à  (non crédité), unique expérience dans ce domaine du monteur (futur récurrent collaborateur d').
5.  a été pour la première fois crédité (sous le nom de Duke Morrison) dans la comédie musicale Words and Music sortie en août 1929.
6. il faudra attendre cinquante-neuf ans pour qu'un film du genre (Dances with Wolves) soit à nouveau récompensé dans cette catégorie.

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