Miller's Crossing

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"You double-cross once, where's it all end? An interesting ethical question."

Comme pour Blood Simple., l'influence du romancier Dashiell Hammett¹ imprègne de manière significative le scénario de cette troisième production de Joel et Ethan Coen. Film de gangsters moins classique qu'il n'y paraît, Miller's Crossing² mise volontiers sur le jeu des alliances et de la duplicité. Au cœur de l'intrigue, l'homme de confiance Tom Reagan tente de démêler astucieusement (mais sans scrupule !) le véritable nœud gordien meurtrier tendu par son patron Leo, la maîtresse infidèle de celui-ci Verna (animée par le sauvetage de son petit frère Bernie Bernbaum) et le partenaire, potentiel concurrent Johnny Caspar.

Ultime association des frères Coen avec Mark Silverman, unique film co-produit par la Fox (distributeur du précédent, Raising Arizona), Miller's Crossing est aussi le premier a posséder une telle épaisseur narrative. La panne d'inspiration connue par les cinéastes³ pendant la rédaction du script n'a, semble-t-il, eu que peu d'incidence dommageable. Drame, cynisme et humour voisinent toujours, le centre de gravité se situant néanmoins résolument du côté de celui-là. L'histoire ne donne, par ailleurs, aucune indication spatiale et temporelle précise (l'action se déroule, d'évidence, à la fin des années 1920). Une façon, peut-être, d'appuyer la teneur contre-utopique d'un récit dans lequel opportunisme et corruption prévalent.

A partir de Miller's Crossing, l'univers coénien se formalise (sans connotation de rigité) davantage. Ainsi, si Gabriel Byrne, Albert Finney⁴ et Marcia Gay Harden se contentent de le traverser, Jon Polito⁵ et John Turturro y deviendront des figures familières, le premier étant à nouveau casté à quatre autres reprises, le second à trois. Steve Buscemi⁶, Sam Raimi et Frances McDormand font également une brève apparition. Le film marque aussi et enfin la dernière collaboration des deux frangins avec le cinématographe Barry Sonnenfeld, passé peu après à la réalisation, mais aussi avec le monteur Michael R. Miller (qui a, au passage, prêté son patronyme au titre), une activité assumée ensuite le plus souvent par les Coen⁷ eux-mêmes.
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1. en particulier "Red Harvest" (1929) et "The Glass Key" (1931).
2. sous-titré "un cadavre sous le chapeau" en France.
3. mise à profit pour écrire Barton Fink, sorti l'année suivante.
4. rôle écrit pour Trey Wilson décédé avant le début de la production
5. envisagé pour être Eddie Dane, il a finalement convaincu les Coen de tenir le personnage de Johnny Caspar.

6. Carl Showalter dans le futur Fargo.

7. sous le pseudonyme de Roderick Jaynes.