dimanche 16 juin 2013

Rear Window (fenêtre sur cour)

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"Tell me exactly what you saw and what you think it means."

Premier des neuf films pour lesquels  venait de s'engager avec la ParamountRear Window est rapidement devenu l'une des œuvres emblématiques de cette fructueuse décennie 1950 et, plus généralement, de la carrière du génial cinéaste. Si le meurtre d'une conjointe y sert à nouveau1 de principal ressort narratif, la courte histoire du romancier new-yorkais  (Phantom Lady, The Window, La Mariée était en noir) permettait également à  de renouer avec le huis clos2Pour la première de ses quatre collaborations consécutives avec le maître du thriller, la seule d'entre elles nommée aux Academy Awards, l'ex-journaliste devenu scénariste  façonne Lisa, l'amante du personnage central, à l'image de sa propre épouse, mannequin de couturiers.
Le déroulement des faits, en particulier l'opportunité de mise en évidence du crime naissent d'une conjonction de circonstances. Immobilisé chez lui en raison d'une jambe gauche cassée lors d'un reportage, le photographe L.B. 'Jeff' Jefferies passe le plus clair de son temps à observer les résidents d'appartements dont les fenêtres, le plus souvent ouvertes en raison de la forte chaleur estivale, donnent toutes dans la même cour. Frustration et curiosité naturelle (professionnelle) le conduisent à ce bien innocent voyeurisme. Une pratique inconvenante (présumée indécente3) qui suscite néanmoins un léger sentiment de culpabilité stigmatisé par les désapprobations de Stella, l'infirmière engagée par la compagnie d'assurance pour lui prodiguer des soins. Miss Torso ne cherche visiblement pas à dissimuler sa plastique de jeune et jolie ballerine, ni la présence de ses empressés courtisans. Les cérémonies illusoires, attentes et désespoirs de la mûre célibataire Miss 'Lonelyhearts' interpellent discrètement. Une galerie de portraits fugaces complétée par un compositeur méconnu, une potière amateur, un vieux couple avec chien ayant provisoirement déplacé leur chambre à coucher sur le balcon (de secours) et de jeunes mariés en interminable nuit de noces.
Et puis, il y a Mr. & Mrs. ThorwaldEmma, malade (fictive ?) alitée et rêche ; Lars, vendeur itinérant et probablement infidèle. Une nuit, Mrs. Thorwald disparaît sans raison apparente. Puis 'Jeff' assiste à une étrange série de déplacements effectués par Lars, valise à la main et sous une pluie battante. Une suite d'événements qui éveille aussitôt le soupçon de meurtre conjugal. Encore faut-il en apporter la preuve mais aussi et surtout convaincre un proche valide de croire sa conjecture et de l'aider. C'est à ce stade que le récit recourt à l'intrigue secondaire, relationnelle ou sentimentale, ajoutée à l'histoire originelle. Jusque-là réticent à épouser Lisa en raison de leurs présupposées différences sociales (existentielles), l'aventurier 'Jeff' découvre à cette occasion l'aptitude de la sophistiquée jeune femme à se mettre en danger pour lui apporter un élément décisif de corroboration. Qu'elle puisse être à la fois une femme "parfaite" (dans une vision sans doute un peu machiste du terme) et courageuse. Plus intrépide qu'il ne s'y attendait ; qu'il ne l'aurait, peut-être, lui-même été.
Parmi les riches idées de la production, outre le vaste décor presque clos et le choix d'un bande-son diégétique, celle de réunir  et , couple encore inédit, presque insolite quoique solide et plaisant. Le Canadien , le futur Perry Mason et Ironside des séries télévisées, obtient son plus mémorable second rôle face notamment à  (comédienne plusieurs ois nommée aux "Oscars"). Rear Window a été ajouté au National Film Registry en 1997.
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1. comme dans Strangers on a Train ou le tout récent Dial M for Murder.
2. espace formel (ici paradoxal puisque surtout orienté vers l'extérieur) qui conditionnait déjà les dissemblables Lifeboat et Rope.
3. surtout lorsque, pour cela, 'Jeff' se sert (à partir de la 40e minute) d'une paire de jumelles puis d'un téléobjectif de 400mm.


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