dimanche 12 février 2012

Waterloo Bridge


"I could marry him if I wanted to."

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Formidables années 1930 au cours desquelles un réalisateur pouvait tourner, en un semestre au sein d'un même studio, un aimable drame romantique et un film d'horreur devenu l'un des plus grands classiques du genre. Adaptations évidemment très dissemblables, Waterloo Bridge et Frankenstein partagent néanmoins deux acteurs, Mae Clarke(1) et le Britannique Frederick Kerr, la première étant celle de la pièce en deux actes(2) écrite par Robert Emmet Sherwood(3) et montée au Fulton Theatre de Broadway en janvier 1930. Waterloo Bridge marque aussi et de façon insolite le début de la collaboration entre l'Anglais James Whale et le producteur Carl Laemmle Jr. (fils du fondateur d'Universal et initiateur de sa diversification horrifique).
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Deux ans après avoir abandonné la troupe du "Chu Chin Show", toujours à l'affiche, pour d'autres éphémères engagements, Myra Deauville est désormais contrainte, faute d'emploi, d'appâter le passant pour subsister. A vingt-trois heures cette nuit-là, elle quitte son amie Kitty pour traverser Waterloo Bridge. Elle y vient en aide à une pauvre vieille femme au moment où un raid aérien menace la ville, bientôt secondée par un jeune soldat. Roy Cronin, né lui aussi aux Etats-Unis, la raccompagne chez elle en taxi et lui offre un modeste dîner acheté dans une proche boutique. A son retour, il croise la logeuse Mrs Hobley venue en vain réclamer le paiement des loyers en retard. Myra et Roy sympathisent rapidement, mais lorsque celui-ci propose de lui prêter cinq livres, l'ancienne danseuse se vexe, précipite le départ de son invité puis se prépare sans joie pour aller chercher un client. Le lendemain matin, Roy lui rend une visite inattendue avec un superbe bouquet et un cadeau. Myra n'est pas encore rentrée ; il rencontre Kitty qui habite en face et comprend vite que le militaire en permission s'est amouraché de sa cadette.
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Doté d'un budget modeste en raison des difficultés financières du studio, Waterloo Bridge séduit pourtant par sa simplicité formelle, mettant ainsi en valeur les aspects psychologiques de ce mélodrame en temps de guerre. Le film tire également profit du fort contraste entre le jeu nuancé et mélancolique de Mae Clarke (sous contrat avec Columbia et remplaçante de Rose Hobart qui avait décliné le rôle) et celui, spontané(4) et allègre, de son presque novice partenaire Douglass Montgomery(5). L'ambiguïté, consciente ou induite, qui émane de Myra et mute sensiblement lors de la seconde partie, constitue l'intérêt principal de cette narration apparemment convenue. Les seconds rôles sont enfin plutôt solidement tenus par les Britanniques Doris Lloyd et Ethel Griffies (l'ornithologue dans The Birds), Enid Bennett (Lady Marian du Robin Hood d'Allan Dwan, sur le point de mettre un terme à sa carrière) et la jeune comédienne Bette Davis, récemment engagée par Universal, ici dans son troisième film pour seulement quelques répliques.
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1. dans deux des trois rôles majeurs de sa carrière à cette époque, le troisième étant celui secondaire, non crédité mais inoubliable, dans The Public Enemy de Wellman face à James Cagney sorti aussi en 1931.
2. mise en scène par Winchell Smith avec June Walker et Glenn Hunter dans les personnages principaux.
3. futur quadruple "Prix Pulitzer" (1936, 1939, 1941 et 1948, cette dernière pour une biographie de Roosevelt), auteur de The Petrified Forest et co-adaptateur notamment de Rebecca et de The Best Years of Our Lives (pour lequel il reçut l'"Oscar" 1947).
4. canalisé, en tête à tête, par James Whale !
5. dirigé ensuite par George Cukor (Little Women) et Frank Borzage (Little Man, What Now?) notamment.

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