lundi 2 janvier 2012

Rain (pluie)


"May be the atua is after me."

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Produite par Lewis Milestone seulement quatre ans après la version muette de (et avec) Raoul Walsh, cette deuxième adaptation de la pièce(1) du duo John Colton-Clemence Randolph (elle-même tirée d'un récit de W. Somerset Maugham) n'était guère appréciée de Joan Crawford pour au moins deux raisons. D'abord parce que la première mondiale du film au "Grauman's Chinese Theater" s'était déroulée quelques jours seulement après le suicide de Paul Bern, réalisateur-producteur de la MGM (et récent époux de Jean Harlow). Ensuite en raison de l'échec commercial de Rain, significative déconvenue dans un parcours presque sans accroc depuis son accession au rang de vedette grâce à son rôle dans Our Dancing Daughters. Crawford y reprenait, avec une conviction inégale, le personnage tenu avec succès par Gloria Swanson(2) aux côtés du comédien Walter Huston(3), successeur de Lionel Barrymore.
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En provenance d'Honolulu, le navire "Orduna" est amarré dans le port de Pago Pago (Samoa orientale). Joe Horn, originaire de Chicago et propriétaire de l'épicerie générale locale, y retrouve le couple Davidson accompagné du docteur MacPhail et de son épouse. Il fait aussi la connaissance de la délurée Sadie Thompson, prestement entourée par les trois soldats montés également à bord. Un cas de choléra contrarie la poursuite du voyage vers Apia, obligeant les passagers à effectuer une escale prolongée de deux semaines. Les Davidson, les MacPhail et Sadie sont aimablement hébergés dans la vaste demeure de Horn. Motivé par les remarques de sa femme, Alfred Davidson essaie de mettre fin à la petite fête arrosée et dansante improvisée par Sadie, le quartier-maître du bateau et les militaires. Provoquant une brève altercation entre le chrétien réformateur convaincu et la jeune femme présumée dépravée, soutenue par les marines. Le lendemain, ne parvenant pas à obtenir de Sadie une sincère pénitence, Davidson sollicite une nouvelle fois le gouverneur du territoire.
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Classique mais légèrement étrange, contradictoire récit d'une opposition entre esprit et chair en milieu exotique, Rain conserve une grande partie de sa théâtralité originelle. Les inflexions narratives opérées par Maxwell Anderson(4) apparaissent en revanche plus radicales, brutales pourrait-on dire, qu'elles ne l'étaient dans la nouvelle de l'auteur britannique (influencée par la figure de son oncle auprès duquel il vécut après le décès de ses parents). Lewis Milestone hésite également entre lyrisme un peu formel et un pur réalisme parfois teinté de sur-naturel. La réalisation (non créditée) du natif de la Russie impériale semble d'ailleurs moins affirmée que pour une autre et récente adaptation, The Front Page (déjà avec Matt Moore), pour laquelle il fut nommé une troisième et dernière fois aux Academy Awards. La confrontation Joan Crawford-Walter Huston reste néanmoins intéressant, davantage que les face à face ayant réuni Rita Hayworth-José Ferrer (Miss Sadie Thompson) et Carroll Baker-Michael Bryant pour la télévision.
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1. créée à Broadway en novembre 1922 avec Jeanne Eagels puis, treize ans plus tard, Tallulah Bankhead dans le rôle Sadie principal.
2. qui lui valut la première de ses trois nominations aux Academy Awards.
3. père de John et vedette, la même année, d'American Madness.
4. collaborateur de Milestone sur All Quiet on the Western Front, auteur de la pièce dont est tiré Key Largo et futur "Prix Pulitzer" du drame 1933.

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