dimanche 20 novembre 2011

Hwanghae (the murderer)


"Mais avant de mourir... je dois savoir qui a tout manigancé et pourquoi."

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La solitude a parfois du bon. Co-écrit avec deux compatriotes, Chugyeogja, le premier film du Sud-coréen Na Hong-jin, avait réussi à créer la surprise sans réellement emporter l'adhésion des moins impressionnables parmi les amateurs de thrillers policiers. Plus cohérent (et tout aussi tranchant), Hwanghae, signé seul dans une veine narrative assez proche à celle du précédent, convainc bien davantage. Ce singulier film de gangsters en quatre actes(1), présenté lors de la dernière section cannoise "Un Certain regard", contribue authentiquement à la régénération d'un genre trop souvent stéréotypé, y compris lorsqu'il est issu de la production asiatique récente. Une réactivation animée, avec une vivace endurance mais sans héroïsme frelaté, une seconde fois par le duo d'acteurs, Ha Jung-woo (Shi gan) et Kim Yun-seok (Woochi).
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Yanji, province de Jilin (Chine). Sorti encore perdant d'une partie de mah-jong nocturne, Kim Gu-nam rentre se coucher chez lui. Le chauffeur de taxi est réveillé, quelques heures plus tard, un peu brutalement par son commettant auquel il doit soixante mille yuans, montant réclamé pour le visa vers la Corée du Sud obtenu par son épouse Lee Hwa-ja. Le virement de cette somme que devait effectuer celle-ci, qui depuis son départ l'a laissé sans nouvelle, n'arrive d'ailleurs toujours pas. Remarqué à l'occasion d'une bagarre qu'il a déclenchée parce qu'insulté au cercle de jeux, Gun-nam est convoqué par Myun Jung-hak. Ce dernier lui propose d'éliminer pour son compte un individu à Séoul contre le montant de sa dette.
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Après une nuit de réflexion passée chez sa mère à laquelle il a confié sa fillette, Gun-nam accepte l'offre de tuer Kim Seung-hyun, dont il doit apprendre l'adresse par cœur, assortie d'une explicite menace à l'égard de sa famille en cas d'échec. Après un voyage en train puis en fond de cale d'un navire de pêche en compagnie d'un groupe de travailleurs clandestins, il parvient à Ulsan d'où son voyage de retour est programmé dix jours plus tard. Dès son arrivée en autocar dans la capitale sud-coréenne, il se rend devant l'immeuble de sa victime. L'homme réside dans un appartement situé au sixième et dernier étage, son accès étant protégé par une grille. La première nuit d'observation lui permet de relever l'heure tardive de retour de l'homme en limousine conduite par un chauffeur. Il se met ensuite également en quête du probable point de chute de sa femme, brièvement employée dans un restaurant.
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Dès l'entame du métrage, la curiosité du spectateur est captée par la situation particulière des premiers protagonistes du scénario, appartenant à la minorité d'origine coréenne installée en Chine(2). Mais aussi par cet étrange et fondateur récit, souvenir d'enfance, du sort d'un chien enragé ayant appartenu à Kim Gu-nam. Une rage d'ailleurs omniprésente, pour diverses raisons et sous différentes manifestations, dans Hwanghae. Le second polar de Na Hong-jin est un film à trappes (sans farce !) et à traques(3). Sans doute plus excitant pendant sa première partie plus ethno-sociale et introspective au cours de laquelle la figure centrale troque inconsciemment la souricière à laquelle il résistait mollement contre un féroce piège à loups. L'intrigue secondaire, la recherche de l'épouse disparue, participe également à renforcer sa traîtresse(4) et erratique relégation. Si elle n'était irriguée, influencée par ces solides ferments scénaristiques, la seconde partie apparaitrait, à l'exception de sa "bouchoyère" violence, presque conventionnelle(5). L'efficace prestation de Kim Yun-seok, dont le personnage tient davantage du chien(6) que de l'homme, et plus encore celle de Ha Jung-woo doivent enfin être soulignées.
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1. I- Le chauffeur de taxi - II- Le tueur - III- Le Joseonjok - IV- La mer Jaune.
2. dans la ville-district et chef-lieu de la préfecture autonome coréenne de Yanbian, situé à proximité des frontières nord-coréenne et russe (à environ 200 km de Vladivostok).
3. "tout à traques" selon l'astucieuse expression de Didier Péron ("Libération").
4. il faut à ce propos relever le parallèle distancié opposant les réminiscences ou visions charnelles de Gu-nam de l'explicite acte de domination sexuelle que fait subir Kim Tae-won à son épouse.
5. une manière de concilier les publics ?
6. dont il fait le négoce ; un tempérament canin attesté par les reliefs du repas pris après la course-poursuite en voitures.

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