vendredi 4 février 2011

Hold Back the Dawn (par la porte d'or)


"... Is it love or is it immigration?"

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Ancien créateur de costumes et décorateur passé à la réalisation en 1933, Mitchell Leisen devient peu à peu le spécialiste du film romantique au sein de la Paramount. Il dirige notamment Easy Living, Midnight puis Remember the Night mettant respectivement en vedette les confirmées Jean Arthur, Claudette Colbert et Barbara Stanwyck. Juste après avoir participé, avec I Wanted Wings, au lancement de la carrière de Veronica Lake, Leisen est chargé de porter à l'écran le "Memo to a Movie Producer" de Ketti Frings(1). Co-signé par un prestigieux duo composé de l'immigré austro-hongrois Billy Wilder et du local Charles Brackett (collaborateurs d'Ernst Lubitsch sur Bluebeard's Eighth Wife et Ninotchka et déjà à l'œuvre pour Midnight), le scénario ménage de subtiles aller-retour entre comédie et drame. Nommé dans six catégories des 14e Academy Awards(2), Hold Back the Dawn est aussi la seule production réunissant Charles Boyer et Olivia de Havilland.
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Econduit par l'employé d'accueil des studios Paramount, Georges Iscovescu y pénètre en se joignant à un groupe de visiteurs. Il trouve bientôt le plateau sur lequel tourne Dwight Saxon rencontré à Nice quelques temps plus tôt. Le Roumain, recherché par des agents fédéraux, désire céder urgemment contre cinq cents dollars une histoire. Son histoire, celle d'un mondain, ancien danseur vivant grâce à la séduction de femmes aisées, candidat à l'immigration aux Etats-Unis depuis la frontière mexicaine. Mais le faible quota réservé aux ressortissants de son pays d'origine repousse a priori de cinq à huit ans son accession à la citoyenneté convoitée. Comme plusieurs étrangers en situation comparable, Iscovescu s'installe à l'"Hotel Esperanza" où il obtient la chambre d'un Allemand découvert suicidé. Il y retrouve Anita, son ex-partenaire de spectacle, devenue étasunienne grâce à un éphémère mariage. L'aimable galant se met sans délai en quête d'une potentielle épouse, profitant de la présence de nombreux touristes en ce jour de fête de l'Indépendance. Sans succès à la tombée de la nuit, Iscovescu tente sa chance auprès d'Emmy Brown, une institutrice en excursion avec un groupe de turbulents élèves qu'il avait un peu plus tôt rembarrée.
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Produit par Arthur Hornblow Jr.(4) et tourné entre février et mai 1941, Hold Back the Dawn est évidemment influencé par le conflit européen dans lequel les Etats-Unis ne sont pas encore directement engagé. L'opportuniste duplicité dont fait durablement preuve Georges Iscovescu rappelle d'ailleurs étrangement celle entretenue alors par la dictature carliste roumaine. Le film de Mitchell Leisen dispose de nombreux et substantiels atouts. Parmi lesquels la qualité du récit et du script à la construction induite d'emblée assez surprenante. La fluide simplicité de la mise en scène, seulement bousculée lors de quelques séquences automobiles, adroitement éclairée et photographiée par le talentueux Leo Tover. Et l'interprétation du trio d'acteurs de tête, efficacement soutenu par de solides seconds rôles, la gracieuse et délicate Olivia de Havilland bien sûr, Charles Boyer, largement plus convaincant qu'en Pepe le Moko d'Algiers, et Paulette Goddard (l'ancienne jeune muse de Chaplin) dans le premier de ses cinq rôles sous la direction de Leisen.
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1. dont est issue la séquence en abyme de l'introduction.
2. future dramaturge, récompensée en 1953 par un "Writers Guild Award" pour Come Back, Little Sheba et du "Prix Pulitzer" dramatique en 1958.
3. meilleurs film, scénario, actrice principale, décors et photographie (d'un film en noir et blanc), ainsi que bande originale.
4. passé à la Metro-Goldwyn-Mayer où il sera responsable de Gaslight avec Charles Boyer et de The Asphalt Jungle puis de Witness for the Prosecution.

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