dimanche 3 octobre 2010

Cause for Alarm! (jour de terreur)


"And then I knew what people meant for when they said their heart was broken."

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Cet unique film produit par Tom Lewis, le deuxième époux de Loretta Young, n'était pas destiné à relancer la carrière de l'actrice, oscarisée trois ans plus tôt pour son interprétation dans la comédie The Farmer's Daughter. Le rôle principal de Cause for Alarm! devait en effet être tenu par Judy Garland. On le sait, aux Etats-Unis tout se termine toujours (non par des chansons !) par des avocats, et l'intervention de l'un d'entre eux permit à sa douce conjointe de l'obtenir et de préserver (au plus jusqu'en 1969) la paix du ménage. Imaginé par Larry Marcus(1) et co-signé par Mel Dinelli(2), cet insolite drame à suspense familial ne figure certes pas parmi les meilleures réalisations de Tay Garnett, mieux doté et en verve au cours des deux décennies précédentes (notamment avec One Way Passage chez la Warner et The Postman Always Rings Twice pour cette même MGM). Mais il mérite, à tout le moins, d'être (re)découvert.
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Depuis la défaillance cardiaque de son mari George, Ellen Jones vit recluse chez elle pour veiller sur lui et le soigner. Moralement un peu abattue, elle repense à leur rencontre accidentelle dans la chambre d'un patient du dr Ranney Grahame. L'infirmière Brown, discrètement aimée de ce dernier, avait succombé à la cour faite par cet ami aviateur du médecin au cours d'une permission et attendu son retour de la guerre pour l'épouser. Alité en permanence, George nourrit l'intime et maladive certitude qu'Ellen et Grahame sont devenus amants et qu'ils projettent de le tuer en augmentant les doses de ses médicaments. L'apparent refus de changer de praticien manifesté par Ellen, le retard de celui-ci à venir le visiter et les conversations en tête à tête entre son épouse et Grahame contribuant à renforcer cette conviction. George a d'ailleurs écrit une longue lettre au procureur Langley pour l'avertir du complot et rendre suspect son probable décès.
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A la fois simple et efficace dans sa définition comme dans la réalisation(3), Cause for Alarm! détonne néanmoins (au bon sens du terme) par la frénétique incursion de la psychose meurtrière dans le cadre d'un banal foyer étasunien. Cet environnement quotidien, "naturel" et sans aspérité se voit d'ailleurs successivement renforcé par un postier bavard et impatient de cesser son activité, par une tante elle aussi jacasseuse et égotique ou par une voisine elle presque mutique et forcément suspicieuse. Le jeune Billy alias 'Hoppy' vient à l'inverse apporter par touches cette dimension de rêverie, de fantasme à laquelle le personnage central se trouve également confrontée. L'astucieuse narration à la première personne nous oblige à vivre le drame en obligatoire sympathie avec lui. Et, surtout, sans remettre d'emblée en question sa vision de la réalité, des faits et donc de la vérité(4). Autre intéressant contraste : le soudain épisode de poursuite, au cœur d'un huis clos, de ce qui ressemble à un authentique MacGuffin hitchcockien(5). Le casting affaiblit en revanche le potentiel dramatique du scénario. L'ancienne enfant-actrice Loretta Young surjoue un peu ; Barry Sullivan (Fred Amiel dans The Bad and the Beautiful) et Bruce Cowling, fréquent second rôle dans des films de guerre, peinent à exister auprès de leur partenaire. L'attention se reportant alors sur Brad Morrow (garçonnet que l'on apercevra à nouveau dans The Tall Target et Monkey Business) ou sur Irving Bacon, expérimenté acteur d'appoint de plusieurs prestigieuses productions.
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1. adaptateur Witness for the Prosecution, co-scénariste de Dark City et The Bigamist.
3. opérée en moins de quinze jours entre avril et mai 1950.
4. la fin du film donne matière à le revoir sous un angle plus accusateur.
5. format excepté, le film de Garnett possède d'ailleurs quelques parentés avec un épisode de la série Alfred Hitchcock Presents à laquelle ont collaboré Mel Dinelli, Barry Sullivan... et Richard Anderson que l'on devine dans la séquence du flash-back, en patient à la jambe fracturée, père d'un nouveau-né.

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