mardi 3 août 2010

Kelin


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Les steppes kazakhs, autrefois envahies par les Mongols et province des empires russe et soviétique, ne sont plus un semi-désert cinématographique. Indépendant politiquement depuis une vingtaine d'année, le pays de Darejan Omirbaev a en effet vu émerger d'autres cinéastes(1), régulièrement invités dans les festivals internationaux (et dont les productions ont été proposées, avec constance mais jusque-là sans succès, aux membres de l'AMPAS pour une nomination à l'"Oscar" du meilleur film en langue étrangère). Soumis dans cette dernière catégorie pour la 82e cérémonie des Academy Awards après avoir été présenté au Toronto Film Festival, Kelin, le premier film d'Ermek Tursunov, est une œuvre mystérieuse et lyrique qui mérite l'attention.
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Parce que son amoureux n'a pu remporter les enchères pour obtenir sa main, Kelin doit suivre le prétendant mieux disant. Au moment de la quitter, le vaincu lui entaille l'avant-bras et boit un peu de son sang. Lors de l'étape effectuée sur le chemin qui conduit le couple chez lui, le nouvel époux consomme l'union avec un peu de brutalité. Arrivée à destination, Kelin fait la connaissance de la mère et du jeune frère de son mari. Une complicité s'instaure assez vite entre la très jeune femme et sa nouvelle famille. Parti chercher du bois, le marié découvre être attendu par son rival ; les deux hommes se battent, le premier est tué, son corps bientôt découvert et ramené par son cadet.
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Au-delà de la dimension ethnique (ethnologique et clairement énigmatique pour le commun des spectateurs occidentaux : modalité de mariage, rites funéraires, cérémonies magiques...) presque inévitable, Kelin raconte une histoire dramatique susceptible de toucher quasiment toute l'humanité. Pour ainsi dire sans dialogues, profondément enraciné dans la nature, ici l'une des superbes régions montagneuses au Sud-Est du Kazakhstan, traversé de sentiments, d'élans puissants et contradictoires, le film d'Ermek Tursunov nous narre, selon le mode de la tradition orale, avec finesse et sobriété un épisode du cycle, certes contrarié dans le cas présent, de la vie. Intense malgré les légitimes respirations récitatives, interprété avec une déconcertante aisance spontanée (par des acteurs dans leur premier ou second rôle à l'écran), Kelin élargit notre horizon comme l'avait fait avant lui le documentariste Robert Flaherty il y a fort longtemps ou la réalisatrice de fiction mongole Byambasuren Davaa.

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