dimanche 25 avril 2010

A Bucket of Blood (un baquet de sang)


"... Do you think you or I could have conceived of such a thing, much less have executed it?"

 - film - 10870_4
Peu avant de connaître, au début des années 1960, une notoriété publique plus large grâce à ses adaptations d'œuvres d'Edgar Allan Poe, Roger Corman entama, en 1956, une collaboration avec le scénariste et futur réalisateur Charles B. Griffith. Parmi la douzaine de ces films produits par l'ancien apprenti-ingénieur, A Bucket of Blood est généralement considéré comme le plus intéressant. Cette comédie noire et satirique, commandée par l'American International Pictures(1) et tournée en cinq jours, annonce sans détours The Little Shop of Horrors du même duo auquel sera à nouveau associé l'acteur Dick Miller. Elle inaugure également une forme hybride et dépouillée, trashy, du cinéma horrifique dans laquelle s'illustreront par exemple The Rocky Horror Picture Show ou Braindead.
 - film - 10870_6
Serveur un peu simple d'esprit au cabaret artistique "Yellow Door" de Leonard de Santis, Walter Paisley n'est évidemment pas pris au sérieux lorsqu'il évoque avec certains clients avoir un projet de création. De retour chez lui, le célibataire tente, sans y parvenir, de modeler avec de l'argile le visage de Clara, une amie de son patron, dont il est secrètement amoureux. Exaspéré par son incapacité, par les miaulements répétés de Frankie, le chat de sa logeuse Mme Surchart, et par la soupe qui déborde sur la cuisinière, Paisley entame au couteau la cloison derrière laquelle émanent les cris et tue accidentellement le félidé. Clara est la première, le lendemain, à pouvoir admirer la très réaliste sculpture de chat poignardé. Moins emballé, de Santis propose toutefois de l'exposer et de partager le produit de la vente éventuelle avec son auteur. Le soir, le poète Maxwell Brock fait l'éloge public de son nouveau compagnon. Mais le succès de Paisley sèmant la perturbation, de Santis préfère libérer son employé. Avant de partir, celui-ci est entrepris par une nouvelle admiratrice qui lui offre un petit flacon. Témoin de la scène, l'un des policiers infiltrés dans l'établissement décide de le suivre jusque chez lui. Reconnu détenteur, même involontaire, d'héroïne et sur le point d'être emmené au commissariat sous la menace d'un revolver, Paisley frappe mortellement Leo Raby au front avec la poêle qu'il comptait utiliser pour préparer des pancakes. Il lui faut à présent trouver une solution pour dissimuler durablement ce deuxième cadavre.
 - film - 10870_8
Ouvertement inspiré du House of Wax(2) d'André de Toth (avec Vincent Price dans le rôle principal du prof. Henry Jarrod), A Bucket of Blood apparaît, à travers le personnage de Paisley, comme une métaphore morbide et drôle de la Beat Generation(3) chère à l'écrivain et poète Jack Kerouac dès la fin de la décennie précédente ("revitalisé", sous une acception différente, par le journaliste de San Francisco Herb Caen en 1955). Cependant, Charles B. Griffith prend le contre-pied de l'histoire imaginée par Charles S. Belden puisque le "procédé", ici à l'origine accidentel, sert surtout à pallier une manifeste incompétence (disqualification) artistique. Titulaire de petits rôles dans Apache Woman, le premier de ses vingt-deux films sous la direction de Roger Corman, Dick Miller(4) se montre très convaincant en anonyme rabroué mais décidé à devenir, coûte que coûte, un artiste reconnu. Le reste du casting est en revanche un peu terne à l'exception du Calabrais Antony Carbone, récidiviste cormanien notamment dans le kitchissime Creature from the Haunted Sea et dans Pit and the Pendulum.
___
1. structure indépendante créée en avril 1956, spécialisée dans les doubles programmes à petit budget.
2. production précurseure de la 3D et remake du Mystery of the Wax Museum de Michael Curtiz.
3. littéralement fatigué, cassé ou encore, selon John Clellon Holmes, battu, écrasé, au bout du rouleau.
4. que l'on apercevra notamment dans After Hours et dont les scènes pour Pulp Fiction seront supprimées.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire