samedi 28 novembre 2009

Das Mädchen vom Moorhof (la fille des marais)


"Pourquoi as-tu répandu ta cendre sur notre poêle ?"

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Au moment où le Rhénan-palatin William Dieterle dirigeait Paul Muni dans deux drames pour la Warner et où Fritz Lang s'installait aux Etats-Unis, leur cadet Detlef Sierck réalisait son deuxième long métrage pour les studios Universum Film AG. (producteurs, au cours de la décennie précédente, des principaux films de Lang et de Murnau) que le metteur en scène hambourgeois venait d'intégrer. Troisième adaptation au cinéma* du roman de l'écrivain suédois Selma Lagerlöf (premier auteur féminin à recevoir le "Prix Nobel de littérature", à laquelle on doit notamment Körkarlen), Das Mädchen vom Moorhof permet d'apprécier, outre ses qualités propres, la cohérence artistique du cinéaste d'Imitation of Life en mettant sa carrière en passionnante perspective.
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Allé au village pour y engager une servante, Karsten Dittmar rejoint le tribunal pour obtenir des informations sur l'une d'elles. Il y assiste à la confrontation entre Helga Christmann et son ancien employeur Peter Nolde, désigné par la plaignante comme le père de son enfant. Pour appuyer ses dénégations, Nolde accepte de prêter serment sur la Bible mais il est interrompu par Helga qui préfère retirer sa plainte plutôt que de le laisser commettre un parjure. Sur le chemin du retour, Karsten rend visite à Gertrud Gerhart, sa future épouse malgré la réticence du père de la jeune femme qui aurait préféré pour celle-ci un meilleur parti. Après être rentré chez lui, Karsten retrouve Helga à proximité de la pauvre demeure de ses parents auxquels elle n'ose pas avouer avoir renoncé au dédommagement pécuniaire attendu. Il lui propose de rencontrer sa mère qui souhaite la prendre à son service. Invité à visiter la ferme et à déjeuner chez les Dittmar, le bailli Gerhart finit par donner son accord aux noces de sa fille.
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Mélodrame où la justice, une apaisée rivalité amoureuse et le retour en grâce sont au cœur du récit, Das Mädchen vom Moorhof semble apporter un surprenant contrepoint au régime, désormais dictatorial, sous lequel il est tourné. Autre motif d'étonnement, la remarquable faculté de Douglas Sirk à transposer son art de la scène au plateau. Avec, en particulier, cette préoccupation déjà évidente pour préserver un harmonieux équilibre entre la narration de Philipp Lothar Mayring (collaborateur à plusieurs reprises de Kurt Gerron) et les éléments visuels. De ce dernier point de vue, Sirk réussit avec une aisance confondante à passer d'une belle et réaliste rusticité à, ici ou là, des atmosphères bien plus singulières, influencées par des croyances populaires ou par le cinéma muet. Le discret mais remarquable travelling circulaire lors de l'importante scène "autour" du poêle des Dittmar illustre magnifiquement ce soin. Très convaincantes interprétations de la Viennoise Hansi Knoteck, dont les talents de chanteuse et de danseuse ne sont ici pas sollicités, et de ses partenaires parmi lesquels Eduard von Winterstein (Der Blaue engel) et Franz Stein (second rôle dans M et Das Testament des Dr. Mabuse).
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*après celles des réalisateurs-acteurs suédois Victor Sjöström (The Wind) et turc Muhsin Ertugrul.

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