mercredi 7 octobre 2009

Giù la testa (il était une fois la révolution)


"Tu as du feu ?"

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Sergio Leone n'avait-il pas assez d'estime pour son récit, co-signé avec Sergio Donati, qu'il ait d'abord refusé de le mettre en scène lui-même(1) ? Conçu comme le deuxième volet de sa trilogie "C'era una volta", Giù la testa (i.e "baisse la tête"), même s'il n'est pas le premier film italien situé au cœur de la révolution mexicaine(2), constitue assurément l'un des plus ambitieux, riches et aboutis du genre. Produit par le Romain Fulvio Morsella, co-scénariste de Per qualche dollaro in più et déjà producteur de C'era una volta il West, tourné en Espagne entre avril et juillet 1970, ce sixième et pénultième opus, grand succès public, permit à Leone d'obtenir l'une des trop rares récompenses (de surcroît partagée !) de sa carrière.
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Mexique, début des années 1910. Un misérable péon attend pieds nus et au milieu de nulle part le passage d'une diligence. Prétextant d'aller voir sa mère décédée à San Felipe, il réussit à convaincre le shotgun de le laisser entrer à l'intérieur. Il y déclenche aussitôt le mépris et les railleries d'occupants distingués. Un peu plus loin, le père et les nombreux fils de l'individu lui prêtent main forte pour attaquer et dévaliser l'équipage. Au moment où la bande se débarrasse des passagers, de violentes et successives explosions se produisent en se rapprochant. Puis deux autres les surprennent sur la route ; de la poussière qu'elles provoquent surgit un motocycliste dont le pneu arrière est crevé par le chef des bandits. A titre de représailles, l'inconnu perfore le toit de la diligence à l'aide d'un bâton de dynamite. Bardé d'explosifs, notamment de la nitroglycérine, il persuade son opposant de s'abstenir de le tuer et de réparer son véhicule. Le mexicain comprend vite le parti qu'il pourrait tirer de la science de l'étranger : cambrioler la banque de Mesa Verde. Mais ce "terroriste" irlandais nommé John H. Mallory, dont la tête est mise à prix par le gouvernement britannique, se rend à Shaver Mines (Lucanina) et ne se montre a priori pas intéressé par l'association de malfaiteurs que lui propose Juan.
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"Duck, you sucker!" Remercions infiniment les acteurs principaux du film d'avoir convaincu Sergio Leone de finalement le diriger. Sans atteindre la dimension du précédent ni posséder son lyrisme, Giù la testa restera, aux côtés de A Clockwork Orange, comme l'un des films les plus marquants de la riche décennie 1970 naissante. Le savant équilibre entre humour et tragédie, l'intelligence et la maîtrise de la réalisation contribuent à nouveau à produire cet effet jubilatoire caractéristique des œuvres du cinéaste. A travers cette histoire de duperie et d'amitié, le scénario égratigne sérieusement la représentation mythique du patriotisme et de la révolution. Les sporadiques, brefs et mutiques flash-back donnent au récit cette subtile profondeur temporelle et nostalgique à la saveur si singulière. Une substance incarnée avec beaucoup de talent par Rod Steiger et James Coburn(3), figures de proue d'un casting presque exclusivement masculin. Ennio Morricone signe enfin là ("shon, shon...") l'une des plus inspirées, belles et inoubliables partitions de l'histoire du cinéma.
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1. Peter Bogdanovich a abandonné le projet et Sam Peckinpah été récusé par le distributeur.
3. auparavant seconds rôles de la comédie de Tony Richardson The Loved One. Jason Robards et Clint Eastwood furent pressentis pour être 'John'-Sean, Eli Wallach, Juan Miranda. C'est Henry Fonda qui leva la réticence de Coburn, déjà envisagé pour Per un pugno di dollari et C'era una volta il West, à accepter la proposition de Leone.




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