dimanche 8 juin 2008

Il Vedovo (le veuf)


"... Il y a encore un petit espoir."

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Entre 1957 et 1963, et plus particulièrement à partir de ce Il Vedovo, où il mettait en vedette Alberto Sordi après un petit rôle dans Il Segno di Venere, Dino Risi connaît la première de ses deux grandes et fécondes périodes cinématographiques*. Le cinéaste enchaîne d'ailleurs les tournages, au rythme d'environ deux films par an, sans en sacrifier pour autant la qualité. La comédie conjugale (et entrepreneuriale !) imaginée par le trio composé avec Rodolfo Sonego (avec lequel Risi a déjà collaboré sur le scénario d'Anna de Lattuada) et Fabio Carpi en apporte la ferme preuve.
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Petit industriel milanais spécialisé dans les ascenseurs, le malchanceux et dépensier Alberto Nardi est poursuivi par les créanciers. Son banquier accepte de lui accorder un prêt de vingt-trois millions de lires pour financer un prétendu nouveau projet à la condition qu'il soit co-signé par son épouse. Le patrimoine d'Elvira Almiraghi, mariée depuis cinq ans avec Nardi, est en effet estimé à près d'un milliard. Mais, connaissant à présent les véritables capacités intellectuelles et talents d'homme d'affaires de celui qu'elle surnomme gentiment 'Cretinetti', cette femme de tête a décidé de ne plus combler ses déficits. Nardi en est réduit à récupérer, sans ménagement, le manteau de vison offert à sa jolie maîtresse Gioia pour obtenir une modeste réduction de ses dettes et un bref report des échéances. Il finit par rêver, dans son sommeil puis éveillé, de la disparition de l'humiliante Elvira afin d'hériter de sa fortune et retrouver enfin sa dignité. Celle-ci doit justement partir à Zurich visiter sa mère souffrante ; quelque chose pourrait bien survenir au cours de ce voyage en train.
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Lorsque Dino Risi écrit puis réalise Il Vedovo, son pays vient d'entrer dans une ère quinquennale de prospérité communément qualifiée de "miracle économique" italien. Le plan Marshall a prit fin en 1951, l'Italie est successivement entrée à l'U.E.O., à l'O.N.U. et dans la C.E.E. La nation de Dante retrouve enfin sa pleine souveraineté militaire, diplomatique et économique. Il n'est donc pas étonnant de voir le cinéaste milanais et ses compères scénaristes se moquer, sous couvert d'une épatante comédie funéraire, des affairistes et opportunistes de tous poils (au nombre desquels apparaîtra bientôt, d'abord dans le bâtiment et la promotion immobilière, un certain Silvio Berlusconi) dont les effectifs semblaient alors menacer ceux de la classe ouvrière. Le film pourfend notamment cette idée reçue, encore très actuelle, qui veut que la réussite soit le meilleur indicateur de l'intelligence (et l'entreprise ou l'ingénieur allemand le gage de l'efficacité !). L'aristocrate réduit à la comptabilité, le parvenu, le petit actionnaire ne sont pas non plus épargnés. Seul le doux rêveur, au veuvage purement imaginaire, peut mériter notre estime. D'abord parce qu'il est un artiste**, ensuite un personnage dramatique au sens noble du terme, enfin parce qu'il est interprété par un formidable Alberto Sordi.

N.B. : à noter la brève apparition du chanteur Alberto Rabagliati, titulaire de petits rôles dans Street Angel, le film muet de Borzage, et dans The Barefoot Contessa.
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*la seconde se situant entre 1971 et 1977, marquée notamment par Profumo di donna.
**la séance de travail avec son oncle Alberto, son bras droit Stucchi et l'ingénieur Fitzmayer précédant le final ressemble, à s'y méprendre, à l'élaboration collective d'un scénario.

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