vendredi 14 mars 2008

Nomad


"L'un doit donner sa vie pour que l'autre soit victorieux..."

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Si, comme l'affirme l'expression, une montagne peut accoucher d'une souris, une (modeste mais triomphale) comédie satirique peut à l'inverse donner naissance à un coûteux film à grand spectacle. Rappel des faits : le président kazakh Noursoultan Nazarbaïev* aurait été tellement indisposé par l'image donnée de son pays par Borat** (et par son immense succès !), le film de Larry Charles et Sacha Baron Cohen sorti à la fin de l'année 2006, qu'il aurait presque aussitôt voulu promouvoir un projet cinématographique susceptible, selon lui, de redresser l'honneur et la fierté patriotique kazakhes. Un budget de quarante millions de dollars est ainsi mis à la disposition d'un trio de cinéastes, dont le Russe Sergei Bodrov (Kavkazskiy plennik) et le Tchécoslovaque installé aux USA Ivan Passer (Intimni osvetleni), pour produire une épopée historique à la gloire du Kazakhstan, redevenu indépendant depuis 1991. Nomad a été nommé dans la catégorie "meilleure musique" des "Golden Globes" 2007, cérémonie qui récompensait aussi la prestation d'un certain... S. Baron Cohen.
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Au début du XVIIIe siècle, les hordes nomades kazakhes dispersées sont à la merci des attaques répétées des soldats djoungars venus de Mongolie. Le peuple attend la réalisation de la prophétie annonçant la naissance d'un chef qui, après Gengis Khan, parviendra à réaliser l'union des Kazakhs et à défaire les troupes ennemies, commandées par Galdan, venu du versant Est des Tian Shan. Parmi eux, Oraz le Sage s'est mis à sa recherche et sauve le nourrisson de l'épée de Sharish, meurtrier de la mère de l'enfant. Arrivé au palais installé à Turkestan du sultan Wali, le père du jeune rescapé, le vaillant guerrier obtient de pouvoir s'occuper de la formation du libérateur tant attendu. Parmi les enfants dont Oraz assure l'apprentissage, Mansur et Erali, proches comme deux frères, montrent des aptitudes qui dépassent celles de leurs camarades. Devenus des hommes et de brillants combattants, Erali s'éprend de Gauhar, dont Mansur est depuis longtemps amoureux.
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Ne voir en Nomad qu'un pur instrument de propagande politique et/ou touristique serait une erreur. Porté notamment par Ram Bergman (le producteur du surprenant Brick de Rian Johnson), ce film manifeste en effet d'indéniables qualités artistiques. Sorte de western asiatique ("eastern" !) et mythologique, il peut revendiquer, par ses superbes décors naturels et spectaculaires scènes d'action tournées avec un certain classicisme, une influence fordienne. La trame narrative, pourtant signée par Rustam Ibragimbekov, co-scénariste de Beloe solntse pustyni et collaborateur de Nikita Mikhalkov, reste néanmoins assez nettement convenue, voire primaire. Elle n'évoque évidemment pas le caractère très éphémère de la victoire avec laquelle se clôt Nomad (le Kazakhstan passera en effet rapidement sous la domination de l'empire russe avant d'être intégré à l'U.R.S.S, le tout pendant environ un quart de millénaire). A l'exception d'Ayanat Ksenbai, la renonciation à toute revendication nationaliste de cette production est également attestée par la présence au générique d'un Mexicain issus d'ascendances germano-ibériques (Kuno Becker), de deux Etasuniens nés l'un de parents mexicains (Jay Hernandez), l'autre sino-hawaïens (Jason Scott Lee), et d'un Hawaïen aux origines multiples (Mark Dacascos).
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*à la tête d'un régime, réputé autoritaire et "vaguement" corrompu, depuis 1990 grâce à quelques "aménagements" électoraux.
**avec près de 129M$ de recettes aux Etats-Unis en 21 semaines et 133M$ à l'étranger, Borat: Cultural Learnings of America for Make Benefit Glorious Nation of Kazakhstan a multiplié près de quinze fois sa mise initiale de 18M$ !



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