jeudi 8 novembre 2007

Imitation of Life (mirage de la vie)


"... I want more, everything... May be too much."

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Est-ce un pur hasard si la dernière production de Douglas Sirk aux Etats-Unis, chant du cygne d'une carrière de près de vingt ans à Hollywood, s'intitule Imitation of Life et soit peuplé d'acteurs ? Certes, le réalisateur nourrissait à l'époque d'autres projets de films, parmi lesquels Madame X que David Lowell Rich reprendra en 1965 avec Lana Turner dans le rôle principal. Mais, malade, il ne put les mener à leur terme avant son retour, début 1960, en Suisse. Remake librement transposé du film de John M. Stahl avec Claudette Colbert, tiré de l'ouvrage de la romancière féministe Fannie Hurst paru en 1933, Imitation of Life dresse peut-être aussi un bilan mélancolique de la vie de l'Allemand Sierck, dissimulé sous le nom de Sirk.
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Lora Meredith cherche désespérément sa petite fille Susie sur la plage très fréquentée de Coney Island en cette fin d'été 1947. Elle la retrouve en compagnie d'une nouvelle amie, Sarah Jane, toutes deux surveillées par Annie Johnson, une afro-américaine qu'elle prend pour la nourrice de cette dernière. Mais la blanche Sarah Jane est la fille d'Annie, abandonnée par son mari, lui aussi très clair de peau, à la naissance de l'enfant. Touchée par le désarroi de la jeune fille sans logis, Lora propose de les héberger pour la nuit. La gentillesse et l'aide apportée par Annie ainsi que l'amitié entre les deux enfants a tôt fait de prolonger cette invitation provisoire. Actrice sans emploi, Lora revoit Steve Archer, le photographe rencontré sur la plage tant apprécié par Susie.
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Il la réconforte après une très déplaisante entrevue avec l'agent Allen Loomis provoquée grâce à un mensonge pour tenter d'obtenir un emploi dans une pièce de Tennessee Williams. Même si Lora et Steve s'aiment, la jeune femme privilégie son ambition professionnelle et accepte, contre l'avis de son amant, une proposition de Loomis pour jouer un second rôle dans "Stopover", une comédie de David Edwards. Lora, remarquée par le public et la critique, devient la maîtresse du dramaturge. En dix ans, la comédienne est parvenue au rang de célébrité du théâtre, aidée par la fidèle Annie pour gérer le quotidien et combler son absence auprès de Susie, à présent une gracieuse et gâtée adolescente. Sarah Jane souffre elle toujours davantage de sa négritude cachée.
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Même s'il a aujourd'hui probablement perdu une partie de sa force dramatique*, Imitation of Life reste une bien jolie parabole sur les apparences, le mensonge, la maternité, l'ambition et, au second plan, la ségrégation raciale (cf Pinky). Gros succès populaire et commercial à sa sortie, permettant au passage à Universal de se refaire une santé financière, le film souligne davantage la relation entre Lora et Annie. Juanita Moore, sélectionnée comme Susan Kohner aux "Oscars" et aux "Golden Globes" 1960, vole d'ailleurs un peu au passage la vedette à la star Lana Turner**. L'actrice principale de Peyton Place retrouvera l'année suivante sa jeune partenaire Sandra Dee*** dans le modeste Portrait in Black également produit par Ross Hunter. Cet ultime opus valut enfin à Sirk son unique nomination aux "Directors Guild of America Awards" aux côtés de douze très prestigieux confrères.
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*déjà édulcorée, comparée à celle du roman, par les deux adaptations cinématographiques.
**pour l'anecdote, Imitation of Life est produit juste après la relaxe de Cheryl Crane, la fille de l'actrice, accusée du meurtre de l'amant de celle-ci.
***Natalie Wood avait été pressentie pour tenir le rôle de Susie. Autre parallélisme amusant, la mère de Sandra Dee fit entrer sa fille en primaire à quatre ans, en mentant sur son âge, pour trouver du travail.

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