lundi 7 août 2006

Les Amants du Flore


"... Castor, je voulais changer le monde mais c'est vous qui l'avez fait."


Si plusieurs films ont, depuis fort longtemps, été consacrés aux époux Curie, le couple de Beauvoir-Sartre n'avait, curieusement jusqu'à présent, pas inspiré le cinéma. Les mémoires du 'Castor' ("La Force de l'âge" et "La Force des choses") publiés aux débuts des années 1960 constituaient les uniques témoignages significatifs sur le sujet. Et puis il y eut les parutions, en 1997 puis en 2004, des correspondances entretenues par Simone de Beauvoir avec l'écrivain américain Nelson Algren et avec Jacques-Laurent Bost, un élève de Jean-Paul Sartre, venues écorner le mythe tout en pimentant la relation. Il n'en fallait pas plus (à l'exception peut-être du centenaire de la naissance du pape de l'existentialisme ou des vingt ans de la disparition de l'auteur des "Mandarins") pour donner enfin naissance à un scénario.
Les Amants du Flore couvre la période allant de la rencontre, à la Sorbonne en 1929, des deux futurs écrivains et penseurs à la publication du célèbre "Deuxième sexe" en 1949. Vingt ans marqués par leur succès à l'agrégation et le début de leur carrière d'enseignants en province, par les premières publications, par la Seconde Guerre mondiale et le décès de Paul Nizan, par les voyages séparés aux Etats-Unis et la création de la revue "Les Temps modernes". Mais c'est avant tout au "pacte" conclu entre les deux auteurs et à son évolution, au sein de la "petite famille" (dont les membres ont été étrangement renommés) réunie par eux, que s'intéresse le téléfilm d'Ilan Duran Cohen. Plus comédie dramatique de mœurs que réelle biographie filmée, Les Amants du Flore, production diffusée en prime time sur une grande chaîne de télévision, se permet évidemment des imprécisions, des raccourcis et des impasses comme les absences de personnages cruciaux, la mère de Sartre, descendante des Schweitzer, ou Raymond Aron dont l'influence a été considérable sur la structuration de la pensée sartrienne.
Anna Mouglalis réussit plutôt bien à traduire l'ambiguïté et le trouble de Simone de Beauvoir, le personnage central du film malgré le pluriel du titre. Lorànt Deutsch, faute probablement d'une maturité suffisante, ne parvient en revanche pas à apporter la complexité et la gravité nécessaires au rôle qu'il interprète. Après quelques inquiétudes initiales sur la sobriété du traitement, cette première réalisation pour la télévision d'Ilan Duran Cohen, même si elle n'évite pas facilités et maladresses et néglige un peu les seconds rôles, s'avère dans l'ensemble d'assez bonne facture. 

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