mardi 25 juillet 2006

Jarhead (jarhead, la fin de l'innocence)


"No standard solution exist."

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Le cinéma a-t-il encore quelque chose à dire sur la guerre moderne après Cimino, Coppola, Stone et Kubrick ? Lorsque l'on regarde Jarhead, il faut bien se résoudre à répondre positivement. Et pour deux raisons principales. D'abord parce que les hommes, la géopolitique et accessoirement (pas tout à fait) les armes ont profondément changé au cours des trente ans qui se sont écoulés depuis la fin du conflit vietnamien. Ensuite, parce derrière l'Histoire, la guerre alimente des histoires microcosmiques ou individuelles spécifiques qui méritent d'être écoutées. Enfin, parce qu'il faut être lucide, il s'agit d'un genre susceptible de rencontrer un vrai succès public. Sur ce dernier point, Jarhead peut être considéré comme une déception. Son budget n'a été amorti que grâce à l'exploitation internationale et le film se situe assez loin de Saving Private Ryan* ou de Black Hawk Down au box office. Il n'a d'ailleurs fait qu'un passage hypersonique au milieu du top ten français.
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Engagé volontaire dans les Marines, Anthony 'Swoff' Swofford est recruté par le sergent-chef Sykes et passe les épreuves de sélection pour devenir l'un des huit éclaireurs snipeurs. Tireur, il fait équipe avec l'observateur Troy, engagé comme lui. L'armée irakienne envahit bientôt le Koweït et le régiment de 'Swoff' fait partie des premières forces américaines déployées en Arabie saoudite dans le cadre de l'opération "Desert Shield". Il faut s'acclimater, avec ou sans équipement contre les gaz, aux températures du désert, répondre aux questions des journalistes et, surtout, tenter d'éviter de penser à ce devient femme ou fiancée en son absence. Cinq mois après leur arrivée, l'opération "Desert Storm" est déclenchée.
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Dans son livre éponyme publié en 2003, classique exercice d'auto-psychanalyse par l'écriture, le véritable Anthony Swofford avait décrit, en toute subjectivité, sa parcelle de guerre du Koweït. Sam Mendes, dans ce troisième film, a parfaitement respecté ce parti-pris. Il choisit de proposer, sans recul ni grandiloquence, un témoignage capté à hauteur de vue d'un caporal (rétrogradé). Jarhead débute très précisément comme Full Metal Jacket (bizutage, humiliation, fragilisation psychologique) pour basculer, après la première heure, vers un Désert des Tartares "made in USA".
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A l'exception des rares interventions du contestataire, plutôt civique en réalité, soldat Kruger, le film ne livre pas, au sens strict du terme, de message politique. C'est l'expérience traumatique qui est au cœur du scénario, essentiellement liée à l'inutilité et à l'absurdité du corps d'infanterie engagé dans une guerre "chirurgicale" où dominent, plus que jamais, l'aviation et l'artillerie. Figurants passifs dans les coulisses du théâtre de l'action, 'Swoff' et ses compagnons, cantonnés à la routine et à servir de cobayes à l'industrie pharmaceutique, s'apparentent à un cheval sauvage perdu au milieu d'un champ de puits de pétrole en flammes (une des plus étonnantes et belles scènes du film).
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Le réalisme des situations est, en effet, partiellement atténué par quelques explorations dans la fantasmagorie, un environnement magnifié par la superbe photographie de Roger Deakins, le chef opérateur de The Shawshank Redemption et collaborateur régulier des frères Coen. Petit regret en revanche au niveau du casting, avec un Jake Gyllenhaal un peu terne, à moins que ce ne soit délibéré. Peter Sarsgaard et Jamie Foxx s'en sortent mieux dans l'espace qui leur est laissé. Les seconds rôles sont, d'une manière générale, également assez pauvres. En revanche, les titres qui composent la bande originale sont plutôt bien choisis.

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