lundi 19 septembre 2005

Jôi-uchi: Hairyô tsuma shimatsu (rébellion)


"Inhumain ?"

Souvent présenté comme la suite de Seppuku, probablement parce qu'inspiré par un ouvrage du même auteur, Yasuhiko Takiguchi, Jôi-uchi lui est pourtant assez dissemblable, tant par le récit que par le traitement cinématographique. Les deux œuvres sont, cependant, des critiques de l'idéologie de la société japonaise, médiévale ou moderne, les relations sociales ayant, sous le couvert de la tradition, relativement peu évolué sur cette période dans l'Empire du soleil levant. La sortie du film se situe juste avant le début de la crise profonde rencontrée par le cinéma nippon et qui poussera nombre de réalisateurs, dont Masaki Kobayashi, à tenter l'hasardeuse expérience de la production indépendante. Jôi-uchi reçut le "Prix FIPRESCI" au cours de la Mostra de Venise 1967.
Le suzerain Matsudaïra souhaite voir Dame Ichi, sa concubine répudiée, épouser Yogoro, le fils aîné d'Isaburo Sasahara, samouraï et chef des écuries du vassal Kotani. Isaburo, marié avec un femme autoritaire et acariâtre, ne souhaite pas que son fils connaisse le même sort. Aussi décline-t-il, avec diplomatie, l'offre et l'honneur qui sont faits à sa famille. Yogoro contredit néanmoins son père et accepte ce mariage. Malgré la réputation de la mariée, l'union se révèle heureuse et harmonieuse. Isaburo décide alors de prendre sa retraite au profit de son fils. Une fille, Tomi, naît bientôt de l'amour du jeune couple. Mais le prince héritier meurt subitement et Kikuchiyo, le fils d'Ichi, le remplace pour la succession à la seigneurie. Sa mère est contrainte de retourner auprès de son ancien époux. Yogoro, soutenu par son père, s'y oppose, au risque de diviser la famille et le clan.
Drame cornélien de la soumission et de l'honneur, Jôi-uchi met en relief les rapports de force implacables de la société féodale japonaise au sein de laquelle l'individu, entre résignation et mort, n'a que peu de valeur. L'essentiel de l'intérêt de la narration réside dans la complexité du personnage central d'Isaburo Sasahara puissamment interprété par Toshirô Mifune. Beaucoup plus linéaire que Seppuku*, soulignant ainsi plus intensément la progression dramatique de l'intrigue, le film est également d'une grande beauté géométrique. Le réalisateur et son chef-opérateur ont, en effet, régulièrement recours aux plans en plongée mêlant personnages et architecture, sorte de mise en perspective des liens et des distances dans cet espace tragique en évolution. Les dialogues l'emportent sur l'action et les scènes de combat mais les rares et brèves confrontations, verbales ou armées, entre Isaburo et l'ambigu officier chargé des frontières Asano Tatéwaki, joué par le remarquable Tatsuya Nakadai, sont splendides.
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*contrairement à celui-ci, le script ne fait appel ici qu'à un seul flash-back.

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