lundi 6 juin 2005

Zatôichi goyô-tabi (zatôichi : voyage à shiobara)


"L'homme dessiné est plus beau que toi."

Venant après le décevant Shin Zatôichi: Yabure! Tojin-ken, ce vingt-troisième épisode, le troisième signé Kazuo Mori, est, sans aucun doute, l'un des meilleurs de la saga, renouant avec un opportun classicisme. C'est aussi le dernier film de ce réalisateur méconnu en occident, auteur dès son deuxième long métrage, sur la base d'un scénario d'Akira Kurosawa, d'un excellent chambara, Araki Mataemon: Kettô kagiya no tsuji, avec Toshirô Mifune. Cet antépénultième volet de la série, malgré ses évidents quoique naturels emprunts à certains des opus précédents, possède une belle vivacité et bénéficie d'un joli traitement visuel qui participent pleinement à sa qualité et à son originalité. Il est aussi, étrangement, l'un des deux seuls avec Zatôichi kesshô-tabi, à ne pas mentionner l'auteur Kan Shimozawa au générique.
Une jeune femme, Oshino, est poursuivie, mortellement blessée et dépouillée de son argent par un inconnu. Zatôichi arrive juste à temps pour l'aider à accoucher d'un garçon. Avant de mourir, elle confie son nouveau-né à son maïeuticien d'infortune et lui demande de l'emmener à Shiobara où réside son époux, Sataro. Arrivé sur place, et en l'absence de ce dernier, Ichi, après avoir rencontré Tobei, le responsable de la police ayant débarrassé le village du clan Kurogané, remet l'enfant à sa tante, Oyaé. Peu après, le village, où doit se dérouler une fête annuelle, reçoit la funeste visite du parrain Tetsugoro accompagné de ses hommes. Celui-ci poursuit trois objectifs, racketter les artistes ambulants venus pour participer à la fête, récupérer, en recourant si nécessaire à la force, la charge de police confiée par le gouverneur à Tobei et obtenir le remboursement, en espèces ou en nature, d'une dette contractée par le père d'Oyaé.
Zatôichi goyô-tabi débute donc sur une situation comparable à celle de Zatôichi kesshô-tabi*, mais développe d'autres thèmes. La fausse culpabilité d'Ichi sous-tend les intrigues parallèles, soulignée par le gimmick, mi-humoristique mi-tragique, de sa lapidation répétitive par le jeune Kenta. Mais l'intérêt majeur du film, sur le plan narratif, outre la profonde aptitude, déjà entrevue, au sacrifice du héros aveugle, réside dans les fugitives évocations de sa jeunesse mises en relief par la présence du nourrisson et, surtout, celle de Seiji, le fils de Tobei, à un moment crucial de son choix d'existence. La réalisation est tonique (malgré les incessants changements de rythme) et créative, notamment au niveau de la photographie qui joue souvent sur les éclairages, des gros plans leoniens et la profondeur de champs. Soulignons la belle et inquiétante prestation de l'un des acteurs principaux de Seppuku, Rentaro Mikuni, déjà présent dans Zatôichi rôyaburi et la qualité de la distribution dans son ensemble. Notons enfin le décalage volontaire entre la musique et la chanson-complainte qui ouvre et clôt le film et l'étrange fausse relance terminale.
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*auquel le film ajoute quelques incursions dans les univers spécifiques de Zatôichi nidan-kiri et Zatôichi abare-himatsuri.

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