jeudi 7 avril 2005

Cannabis



"On croit qu'on peut tricher, c'est pas vrai."

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Aussi étrange que cela puisse paraître, c'est une gentille comédie musicale télévisée à succès qui est à l'origine de ce film excentrique. En 1967, le cinéaste suisse Pierre Koralnik et Serge Gainsbourg se rencontrent et collaborent sur Anna. L'auteur de "La Javanaise" en compose la musique et y tient un second rôle. Les deux hommes décident, assez naturellement, de retravailler ensemble. Le point de départ est un obscur roman policier signé par un illustre inconnu, "Et puis s'en vont...", édité dans la fameuse collection "Série noire". Cette fois, le résultat est... plus que surprenant. Et, à part au Japon, cette coproduction européenne est un échec commercial. Le prétexte du film cache, en effet, assez mal sa motivation réelle, donner à Gainsbourg et à sa jeune compagne, Jane Birkin, après Slogan et Les Chemins de Katmandou, une nouvelle occasion de se retrouver ensemble à l'écran. Il faut se faire une raison : si Cannabis est une pure et authentique curiosité cinématographique, les huit films ayant réunis le couple, en tant qu'acteurs, sont résolument faibles, au mieux moyens.
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Serge, après avoir mené avec sa bande, dans une demeure américaine cossue, une opération meurtrière pour la compte de la Mafia, est envoyé en France pour s'occuper d'Emery, un gros trafiquant de drogue local. Dans l'avion, il fait la connaissance de Jane, la fille d'un diplomate. Lorsqu'il est enlevé, à son arrivée à l'aéroport, par deux hommes de main d'Emery puis blessé pendant sa fuite, Serge fait appel à Jane. Elle l'héberge et le soigne chez elle. Ils deviennent amants. Ils sont bientôt rejoints par Paul, lui aussi en provenance des Etats-Unis, pour aider Serge dans sa mission. Ils débusquent ensemble le principal revendeur de drogue, un danseur de l'Opéra, lequel leur indique, sous la contrainte, l'emplacement du laboratoire de stupéfiants. Après avoir fait sauté ce dernier, Serge devient la cible d'Emery et d'un inspecteur de police.
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En regardant Cannabis, on se demande rapidement quelle était la substance consommée par les auteurs du script au moment de sa rédaction. Le réalisateur avoue avoir été plus intéressé par les aspects visuels du film que par sa narration. Ce n'est pas peu dire. La trame est pauvre, en particulier le premier tiers, et surtout totalement décousue. Le montage s'apparente parfois à un collage arbitraire de scènes choisies au hasard. Reste un témoignage déconcertant sur les années 1970 naissantes, la capture du phénomène hippie par la bourgeoisie parisienne et les hommes en manteau de fourrure. Pendant que Chabrol tournait Le Boucher en province, que Melville traçait son intemporel Cercle rouge et Godard perdait sa verve créatrice des années 1960, Pierre Koralnik édifiait un étrange et fugitif écrin à son couple vedette réuni depuis peu. Jane Birkin, celle qui a remplacé BB dans le cœur et sur les disques de Gainsbourg (le film s'intercale entre "Serge Gainsbourg & Jane Birkin" de 1969 et "Histoire de Melody Nelson" de 1971) y est plus décorative que réellement actrice. Cannabis est, probablement aussi, un des facteurs à l'origine du passage du compositeur-interprète à la réalisation, six ans plus tard, avec Je t'aime moi non plus.

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