mercredi 23 février 2005

Masked and Anonymous


"C'est le dernier homme à s'être tenu debout."

Bob Dylan reste, décidément, un personnage imprévisible. Toujours là où on l'attend le moins (et inversement), il signe, sous le double pseudonyme d'Enrique Morales et de Sergei Petrov, avec ce Masked and Anonymous, son second scénario pour le cinéma et endosse le cinquième rôle de sa carrière d'acteur, entamée, trente ans plus tôt, avec le Pat Garrett and Billy the Kid de Sam Peckinpah. Que les choses soient claires : le film est un authentique Objet Filmique Non Identifié, n'appartenant à aucun genre... si ce n'est, peut être, le vaudeville dramatique. Et c'est justement ce qui fait son charme. Cette production indépendante, tournée en vingt jours et présentée au Festival de Sundance en janvier 2003, aux fausses allures de superproduction, est également la première réalisation pour le grand écran de Larry Charles, plus connu pour sa participation à l'écriture de la série Seinfeld avec laquelle Masked and Anonymous partage un certain sens de l'humour noir.
Dans une dictature minée par la guerre civile et en dégénérescence avancée est organisé un concert de charité destiné à financer l'aide humanitaire. Opération de restauration de l'image dégradée du pouvoir, moyen de détourner l'attention d'un régime à bout de souffle ou pure escroquerie ? A défaut de parvenir à faire figurer à l'affiche une vedette incontestable*, Oncle Sweetheart et Nina Veronica, les promoteurs, font appel à une ancienne célébrité, Jack Fate, libérée de prison pour l'occasion. Les choses vont singulièrement se compliquer avec l'arrivée de Bobby Cupid, un ami de Fate et, surtout, celle, peu amicale, du journaliste Tom Friend. D'autant qu'il existe de troubles relations entre Jack Fate et les hommes à la tête du pays, relations qui sont à l'origine de son incarcération.
Masked and Anonymous est métaphorique et poétique comme... une chanson de Bob Dylan. Avec, peut-être, l'ambition d'explorer "le non-sens des choses", comme le confesse, en conclusion, Jack Fate. Le récit, qui multiplie les références cinématographiques et musicales (de The Invisible Man de James Whale à Frank Zappa, Jimi Hendrix ou Janis Joplin en passant, de manière plus symbolique, par la veste en peau de serpent du roadie Bobby Cupid), n'est pas l'essentiel de ce film insolite, dont une des versions, dans laquelle figurait une Femme en rouge ayant les traits de Laura Harring, durait trois heures. Son intérêt naît de ces destins croisés de personnages tenus par Bob Dylan et par une pléiade d'acteurs aussi divers que Jeff Bridges, Jessica Lange, Penélope Cruz, John Goodman, Val Kilmer... La scène avec ce dernier est, d'ailleurs, particulièrement savoureuse, imprimant au film une tonalité décisive. Masked and Anonymous ne livrant pas toutes ses facettes à la première vision, le DVD constitue son support privilégié.
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*Sting, Springsteen, Billy Joel ou McCartney.

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