mardi 17 août 2004

Taiyo no oji : Horusu no daiboken (horus, prince du soleil)


"Il faudra unir vos forces, vous devrez rester soudés et vous n'aurez rien à craindre."


Premier film pour le cinéma de Isao Takahata, Taiyo no oji : Horusu no daiboken est le fruit de la collaboration du metteur en scène, auteur du story-board, avec le dessinateur Hayao Miyazaki. Initié en 1965 et produit par le département "Animation" du studio Tôei, le film mettra trois ans, parfois dans la douleur, pour exister et sortir sur les écrans où il rencontra un échec cuisant. Echec d'autant plus étonnant que le film offrait, à l'époque, une alternative de qualité à une animation japonaise, pour l'essentiel réfugiée à la télévision, souvent médiocre.
Horus est un jeune adolescent plein de fougue qui vit, avec son père et son jeune ours Koro dans une région isolée, au bord de la mer. Il lutte régulièrement contre une meute de loups en maniant avec dextérité une hache. Un jour, poursuivi par ces loups, il réveille Moog, le géant de pierre. Une fois débarrassé de ses adversaires canidés, il retire de l'épaule de Moog ce qu'il croit être une épine et se révèle être une épée encore à l'état brute. Il s'agit de l'épée du soleil qui donne, une fois forgée, à son possesseur une invincibilité au combat. Horus rentre chez lui montrer sa trouvaille à son père, mais celui-ci est mourant. Il lui raconte les circonstances de leur isolement, après qu'un démon ait détruit leur village et lui demande de retourner parmi les hommes et les aider à lutter contre cet ennemi commun. Après s'être brièvement opposé au démon Grunwald qui souhaitait, vainement, s'en faire un allié, Horus arrive dans un village qu'il sauve de la famine en tuant un brochet géant à l'origine d'une pénurie de poissons. Alors qu'il poursuit un loup gris, il rencontre Hilda, une belle mais énigmatique jeune fille solitaire au chant presque hypnotique et l'a ramène au village. La menace Grunwald devient de jour en jour plus pressante. Les habitants du village doivent subir, successivement, une attaque massive de loups et de rats. Dans la lutte finale, Horus pourra compter sur son épée du soleil, enfin forgée, et sur l'unité des hommes.
A quelques détails près, qui peut, raisonnablement, donner, sans se tromper, un âge à Horus (plus de trente-cinq ans, faut-il le rappeler) ? Vingt-ans avant Hotaru no haka qui apportera à son créateur la reconnaissance internationale et marquera une nouvelle étape dans l'animation japonaise, ce film (en full animation 2D) séduit tout à la fois pour la qualité et la modernité de sa réalisation et de son scénario. Son accouchement ne fut pourtant pas facile et il dut subir, entre autres, coupures et remontages inopportuns pour satisfaire aux exigences des producteurs. Au début des années soixante, les animateurs du studio Tôei doivent faire face à la standardisation de l'animation. En 1961, Osamu Tezuka, un ancien de la Tôei, créé sa propre société et lance, en 1963, la première série animée télévisée japonaise, Astroboy. Le rythme hebdomadaire et l'utilisation du mouvement limité perturbent ses concurrents. Tôei répond avec Okami shônen Ken dont quelques épisodes sont confiés à Isao Takahata, alors assistant inconnu. Mais le département animation (douga) du studio a aussi une ambition qualitative dans le long-métrage. Il désigne Yasuo Otsuka maître d'oeuvre d'Horus. Celui-ci supervise l'animation et choisit son ami Isao Takahata comme metteur en scène. Yôichi Kotabe (animation-clé) et Hayao Miyazaki (décors, conception graphique) se joignent au projet. C'est la magie de ce carré d'as qui est à l'origine de la qualité du film. Miyazaki et Takahata ont, depuis, fondé le studio Ghibli et Kotabe est passé chez Nintendo.
Ce qui frappe à la vision de ce film composite, c'est d'y constater l'influence significative de Hayao Miyazaki, (personnages fantastiques, animaux incarnant la conscience, nature omniprésente) alors qu'on le sait, Takahata est plus intéressé par un réalisme relatif comme il le montrera dans Le Tombeau des lucioles. Le personnage ambivalent d'Hilda et les cérémonies villageoises notamment, font immédiatement penser à Princesse Mononoké ou au Voyage de Chihiro. Deux épisodes (l'attaque des loups et celle des rats) font appel à la technique de montage d'images fixes. On ne sait pas si ce sont des contraintes de coût ou un moyen d'adoucir, pour le jeune public, la férocité de ces séquences qui ont présidé à ce choix. Enfin, les jeux de lumière qui émaillent le film sont tout simplement remarquables... à une époque où l'ordinateur ne régnait pas encore. Un spectacle vivement conseillé aux petits... comme aux grands. 

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire