mardi 6 juillet 2004

Love Actually


"I've looked at love from both sides now
From give and take, and still somehow
It's love's illusions I recall
I really don't know love at all." (in "Both Sides Now" de Joni Mitchell)

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Premier film, en tant que réalisateur, de Richard Curtis, le scénariste des principales comédies romantiques britanniques des années 1990-2000* et créateur du personnage de Mr. Bean, Love Actually** est une œuvre chorale inégale mais plaisante. Bien différente de ses équivalents états-uniens pour lesquels la ceinture est le point sommital de leur niveau intellectuel (sic) et moral (malgré cela, le public français lui a largement préféré American Pie 3). Score en salles seulement honorable chez nous (un peu moins d'un million de spectateurs), gros succès international, le film est nommé à deux reprises pour les Golden Globes (meilleure comédie, meilleur scénario de cinéma) mais a le malchance de sortir la même année qu'un certain Lost in Translation.
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Qu'est-ce qui, aujourd'hui, intéresse vraiment les anglais (et donc le monde)*** ? L'amour, bien sûr (actually) ! The Beatles ne le clamaient-ils pas déjà en 1967 ? Pour preuve, à l'approche des fêtes de fin d'année, la belle Juliet (Keira Knightley) épouse Peter (Chiwetel Ejiofor), le meilleur ami de Mark (Andrew Lincoln), qui semble bien troublé (par le marié ?). Jamie (Colin Firth), un écrivain trompé par sa femme, trouve refuge dans le sud de la France et se retrouve durablement accroché à Valeria (Lucia Moniz), sa femme de ménage portugaise. Daniel (Liam Neeson), récemment veuf de son épouse, essaie d'aider son jeune beau-fils Sam (Thomas Sangster) a déclarer sa flamme à une de ses camarades de classe. De l'autre côté de la ville Karen (Emma Thompson), la mère, classique, de deux charmantes jeunes filles, redoute de perdre son mari, Harry (Alan Rickman), auquel une de ses collaboratrices fait un "rentre dedans" très expressif. Une autre d'entre elles, la solitaire Sarah (Laura Linney), en pince, presque secrètement, pour Karl (Rodrigo Santoro), un beau ténébreux parmi ses collègues, lequel n'est pas, en retour, indifférent à ses charmes. La vedette de la chanson, Billy Mack (Bill Nighy), réussira-t-il à devenir n°1 des charts... et avouer son affection, bien cachée sous l'ironie et le cynisme, pour son manager Joe (Gregor Fisher). Enfin, last but not least, le premier ministre lui-même, célibataire endurci et frère d'Emma, David (Hugh Grant), succombe aux gracieuses rondeurs de Natalie (Martine McCutcheon), un des membres subalternes de son cabinet.
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La comédie romantique ultime ? Pourquoi pas, même si l'on sait à l'avance que ce filon cinématographique n'est pas près de s'épuiser. Bien qu'il offre une vision un peu conventionnelle de la société****, l'un des atouts de Love Actually est de "balayer" presque tout le spectre du genre. Célibataires (y compris adolescent), jeunes mariés, vieux couple, séparés ou veuf, presque toutes les situations, tous les représentants de la population***** sont réunis pour souffrir et aimer, les deux termes étant définitivement indissociables. Pour preuve (bis !), le scénario décompte à rebours cinq semaines avant Noël, date anniversaire d'une autre histoire de souffrance et d'amour. Le scénario et les dialogues, souvent bien inspirés et lisibles malgré la multiplicité des intrigues, jouent à la fois sur l'humour et l'émotion et sur les relations croisées entre les personnages. Parmi eux, ceux interprétés par Emma Thompson, Alan Rickman, Liam Neeson et Colin Firth sont les plus convaincants et intéressants. Citons, tout de même, la scène dans laquelle un Hugh Grant "blairien" s'oppose, contre toutes attentes, en conférence de presse, au président des Etats-Unis (joué par Billy Bob Thornton) par pure jalousie amoureuse. Le fil rouge du duo de doublures d'un film érotique (Martin Freeman et Joanna Page) est digne des standards des Monty Python et les deux courtes apparitions en génie du bien de Rowan Atkinson, un complice du réalisateur, sont savoureuses (plus que celles, surpayées, de Claudia Schiffer et Denise Richards). Enfin, évoquons la prestation délirante, mais contrôlée, de Bill Nighy en rock star quelque part entre le regretté Robert Palmer et l'ancien chanteur des Roxy Music, Bryan Ferry et la bande originale riche de plusieurs chansons populaires dont une version spéciale de "Love is all around" (morceau déjà présent sur Four Weddings and a Funeral) et le superbe "Both Sides Now" de Joni Mitchell qui accompagnait, deux ans plus tôt, Life as a House.
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*dans l'ordre : Four Weddings and a Funeral, Notting Hill, et associé à l'auteur du roman Helen Fielding et à Andrew Davies pour Bridget Jones's Diary. Il a également participé à la suite de ce dernier, dont la sortie est prévue fin 2004.
**attention : "actually", au double sens, est un faux-ami en anglais !
***le film est volontairement daté après le 11 septembre 2001.
****au moins trois des couples mettent en présence un homme et une femme subordonnée.
*****mais pas tous les milieux sociaux, le cadre est résolument middle-high class.

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