lundi 3 mai 2004

The Good Thief (l'homme de la riviera)


"Quand on aime, on ne demande pas pardon."

Dans son régulier va-et-vient entre le bon et le moins bon, le romancier et cinéaste irlandais Neil Jordan inscrit The Good Thief plutôt dans la seconde catégorie. Non pas que son remake du Bob le flambeur de Melville soit déplaisant, mais on se demande un peu où sont passés les vingt-cinq millions de dollars du budget tant le résultat ressemble à une production télévisée seulement correcte. Et se poser deux questions : Le réalisateur a-t-il eu l'ambition du slogan commercial* du film ?! A-t-il vraiment aimé son modèle pour lui faire un enfant si illégitime ?
Bob Montana (Montagné ? - Nick Nolte), toxico, flambeur et ancien truand, réside à Nice. Après avoir sauvé, de manière chevaleresque, Anne (Nutsa Kukhianidze), une jeune bosniaque en situation irrégulière, des mains de son futur souteneur, Rémi (Marc Lavoine), il accepte l'idée de son ami Raoul (Gérard Darmon) de s'attaquer au casino de Monaco, la veille du "Grand Prix" (de Formule 1 ?). La subtilité du projet est de faire croire, et savoir, que l'on va s'attaquer au coffre alors que la cible est, en réalité, la collection d'oeuvres d'art installée et protégée dans une villa à proximité, miroir authentique des copies qui ornent les murs des salles de jeux. Roger (Tchéky Karyo), l'inspecteur niçois dont la vie a été sauvée, dans le passé, par Montana, colle aux basques de ce dernier après avoir été informé de l'opération pas Saïd, le fournisseur de dope de Bob auquel il doit, pourtant, de ne pas avoir été expulsé dans son Algérie natale. Le soir du casse, pendant que l'équipe s'active dans les fondations du musée privé, Bob gagne une fortune sur les tables du casino.
Jordan, s'il a conservé, parfois dans le détail (par exemple, la conversation entre Bob et Yvonne, la patronne du bar habituel), le contenu narratif des Le Breton et Melville, en donne une coloration très différente. D'une œuvre marquée par un certain pessimisme et par le poids de la fatalité, le metteur en scène fait un polar light, qui frôle parfois avec le burlesque. Pas d'exploration urbaine, juste du tourisme avec, parfois, une jolie photographie. Pas d'amitié et de trahison, ni de "beauté de l'art" mais la recherche de l'intérêt lucratif, quelqu'en soit le niveau. Bien sûr, cette version de Bob reste celle d'un idéaliste, mais dans les limites d'un certain sentimentalisme et d'une certaine nonchalence. C'est vers le thème du vrai et du faux** et du double qu'il faut chercher une piste, sans qu'il soit véritablement développé. Ce qui déroute, voire agace, c'est ce maniérisme formel (notamment ces incessants arrêts sur image de fin de séquence) qui, paradoxalement, accompagne un visible détachement par rapport à la réalisation. L'apparition d'Emir Kusturica en guest star dans le rôle, amusant, de l'ingénieur chargé système de (dé)protection des oeuvres d'art, renforce ce côté artificiel. Enfin, si on peut comprendre le choix de la langue principale du film, pourquoi, diantre, faut-il que les quelques dialogues entre français soient dits en anglais ? Une dernière question : pourquoi les diffuseurs ont-ils affublé Nolte d'un pistolet sur l'affiche alors qu'il n'en utilise pas pendant le film, constituant même une contradiction par rapport à l'esprit du personnage ? Je tente une réponse : pas assez viril et percutant, le polar jordanien ?
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*"il ne veut pas d'argent, il veut ce que l'argent ne peut acheter."
**faux-vrai cambriolage, vrais et faux tableaux, y compris l'oeuvre de Picasso obtenue par Bob dans des conditions romanesques, vraie-fausse histoire des origines du personnage, travesti, jumeaux...

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