jeudi 22 avril 2004

Le Tango des Rashevski


"- Simon : C1-F4. Il y a encore notre père.
- David : Oui, c'est bien ce que je disais, nous sommes orphelins."

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Après une carrière de publicitaire, Sam Garbarski se lance dans le cinéma et tourne, en deux ans, trois courts métrages. Le Tango des Rashevski est son premier long métrage. Associé, depuis le début, avec le scénariste (Une Liaison pornographique) et réalisateur (Un Honnête commerçant) Philippe Blasband, ils concoctent ensemble, pour ce film, une recette de comédie douce-amère à base d'humour juif, nappée de tradition et d'universalité. La sortie en salles s'est traduite par un tout petit succès de curiosité, il est vrai à l'ombre des blockbusters américains Bruce tout-puissant et autres Pirates des Caraïbes (où on ne fait pas dans le "shmattès", je veux dire, la dentelle !). Le public lui a préféré une autre comédie familiale, celle de Boujenah, Père et fils.
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Grand-mère Rosa, après avoir vainement tenté de se réconcilier, ou au moins de discuter, avec son ancien mari, meurt. Ses enfants et petits-enfants découvrent qu'elle a acquis, malgré son manque affirmé de dévotion, une parcelle dans le carré israélite du cimetière. Désarmés par cette dernière extravagance et leur absence presque complète de pratique religieuse, son fils aîné Simon Rashevski (Michel Jonasz), chausseur de son état, marié à Isabelle (Ludmila Mikaël), une non-juive et son frère David (Daniel Mesguich), chirurgien divorcé, vont tenter de se montrer à la hauteur de ce défi, d'être ce que Rosa nommait des "mensch". Mais c'est toute la famille qui est bouleversée par cette perte, pas seulement celle de l'être mais aussi par la prise de conscience de celle de ses racines. Nina (Tania Garbarski), la fille de Simon ne veut épouser qu'un juif, ce qui va pousser Antoine (Hippolyte Girardot), l'ami du frère de Nina, Jonathan (Jonathan Zaccaï), tombé amoureux d'elle, à entamer une conversion. Ric (Rudi Rosenberg), le fils de David, va rompre avec son amie arabe. Simon et David vont se remettre en question. Et Dolfo (Natan Cogan), le beau-frère de Rosa, perdre petit à petit pied. Tout se terminera, rassurez-vous, assez bien... Enfin presque.
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"Vous êtes juif ? prouvez-le !", tel pourrait être, en reprenant le nom du recueil de nouvelles de Shargorodsky, le sous-titre du film de Garbarski. Cette comédie, inspirée de celles du cinéma italien, chez les ashkénazes est sans conteste attachante. D'abord parce qu'elle montre bien le poids insoupçonné des racines, de l'identité, souvent révélé à l'occasion d'un événement dramatique. Ce poids, encombrant, à son tour révèle l'essence des êtres. Etre un "mensch", c'est assumer ce que l'on est... même si l'on a tort. A leur façon, les personnages du film sont tous des "mensch", y compris (et même surtout) les femmes. Rosa l'était probablement, elle qui avait fondé une nouvelle spiritualité dans le tango. Mais savoir si elle était dans le vrai est un autre débat qui n'a pas sa place ici. L'autre qualité du film est sa sensibilité, parfois maladroite mais sûrement sincère. Mais on peut ne pas être convaincu par son discours oecuménique un peu artificiel. Et pour le rendre, au moins, cohérent, il aurait fallu que les auteurs du scénario se documentent un peu plus ou mieux sur les sujets de religion qu'ils abordent. En outre, la relation entre Nina et Antoine occupe trop de place, au détriment de personnages plus complexes et intéressants comme ceux de David ou Jonathan, qui sont, à peine, survolés. En revanche, on apprécie de revoir Hippolyte Girardot dans une vaillante et belle nouvelle maturité. On aurait, cependant, aimé profiter un peu plus de Ludmila Mikaël et Daniel Mesguich, tous les deux très bons.

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