mardi 23 décembre 2003

Alien³


"Et dans la mort de tout être, si infime soit-il, il y a toujours une nouvelle vie, un nouveau commencement."

 - film - 302_3
Alien 3 est souvent considéré comme un opus mineur dans la série. Pour ma part, je le tiens dans une estime comparable à celle que j'ai pour Aliens de James Cameron,... voire, au risque de déranger certains (et par goût de la provocation), en meilleure position que celui-ci. Le baroque, assumé ou inconscient, de David Fincher me semble apporter une dimension supplémentaire à son film, caractéristique stylistique qu'il emploiera et développera avec talent dans Se7en. Il permet, en particulier, un télescopage temporel du meilleur effet.
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Les amateurs de la série se souviennent de la fin, pleine d'espoir, d'Aliens. Fincher et ses scénaristes décident d'enchaîner, sans transition ni délai, avec leur propre film. Mais en lui donnant une coloration beaucoup moins optimiste. Un incident survient donc pendant le voyage de retour de Ripley et de ses passagers plongés en hypersommeil ; une capsule de survie les fait atterrir sur la planète Fiorina "Fury" 161 qui abrite une raffinerie de minerais et un pénitencier de haute sécurité pour détenus à chromosome double Y. Seule rescapée du vaisseau et unique femme au milieu d'un petit groupe de prisonniers évangélisés mais peu recommandables, l'héroïne de la série devra affronter avec eux un Alien qui a fait le voyage en sa compagnie et, en solitaire, une terrible vérité.
 - film - 302_11
Le réalisateur situe son action dans un huis clos quasiment médiéval. La prison, qui était dans la première version du script, un monastère, a conservé cette ambiance obscure et inquiétante des lieux de cette époque de l'histoire. Les tonalités visuelles, elles-mêmes, métalliques, sont celles que l'on s'attend à trouver dans un récit de châteaux et de maléfices. Et cette fascination de Fincher pour la pourriture et l'infestation qui tranche avec les environnements aseptisés habituels de la science-fiction. Rappelons-nous, car nous pourrions considérer ce film à l'aune de ses productions suivantes, qu'il s'agit du premier long-métrage de fiction du metteur en scène. Qu'il se frottait d'emblée à une suite, sorte d'épreuve initiatique pour cet "à peine" trentenaire venu de la musique et d'un autre monstre (Madonna). Et que la production ne lui a rien épargné en terme d'avanies diverses et variées. Au point qu'il refuse d'assumer la paternité d'Alien 3. Mais l'enfant ressemble trop au père et le talent de Fincher est trop apparent à l'écran. Ne serait-ce que par cette atmosphère "théologique" qui sous-tendra également Se7en, et cette incroyable faculté de captation des personnalités. Alien 3, plus encore que l'opus fondateur, est un film de personnages et de psychologies. Il faut apprécier aussi les libertés prises avec le mythe : transformer l'Alien en animal furtif, lui qui était d'une pesanteur toute symbolique dans les deux premiers épisodes. Oser mettre le spectateur en situation de voir à travers les yeux du monstre, opération lourde de sens et, enfin, assumer le geste sacrificiel final, donc la responsabilité d'une évidente conclusion qui, hélas, ne sera pas validée par les affairistes de tous poils et autres pigments synthétiques.
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Ripley/Weaver rasée (il a fallu mettre le prix !) et maladive est encore plus masculine que dans les opus précédents et, pourtant, elle n'y a jamais été aussi féminine à la fois. Dès le début du film, elle véhicule, avec un calme presque inhumain, le drame qui se joue et porte à son niveau ultime la tragédie et la fatalité dont elle est l'héroïne. L'ex-détenu Charles Dutton (qui aura droit à une apparition dans Se7en), campe, hors Ripley et les androïdes, avec Dillon, le personnage le plus intéressant de ce qui n'est encore qu'une trilogie. On peut regretter la disparition si rapide de Charles Dance dans le rôle du docteur Clemens qui, lui aussi, recelait un fort potentiel. D'une manière générale, toute la distribution est bien composée, avec cette majorité d'acteurs britanniques qui donne au film ce délicieux accent colonial suranné.

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