dimanche 9 novembre 2003

Bichunmoo


"Je te quitte à nouveau..."

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Etonnante maturité et vitalité du cinéma coréen. Pourtant presque centenaire (le premier film remonterait aux années vingt, en pleine colonisation japonaise), il est encore peu connu en Europe et dans le monde. Un premier festival du film coréen, organisé à Beaubourg en 1993, nous a permis de découvrir une autre facette du cinéma asiatique. Le festival de Cannes 2000 sélectionne le Chunhyang de Im Kwon-Taek, une première historique pour le cinéma coréen, mais récompense deux fois (interprétation et technique) une oeuvre du grand rival chinois de Hong-Kong, In the Mood for Love.
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C'est cette même année que Kim Young-jun réalise son premier et actuel seul film, Bichunmoo, inspiré d'un comic book (manga) coréen très populaire dans les années 1980. L'action se passe en 1343, trente ans avant les événements décrits dans Musa. La Chine est sous la domination de la dynastie mongole Yuan. Dans les provinces du nord-est, la population est constituée d'autochtones et d'immigrés de Koryo (ancienne Corée). Belle histoire d'amour, de vengeance, de rivalité et de sacrifice, partiellement fantastique, Bichunmoo relate la difficile passion entre le jeune Jin-ha, un orphelin koryo initié aux secrets de l'art du combat Bichun, qui va découvrir qu'il est d'extraction noble, et la jolie Sullie, la fille d'un général mongol et d'une concubine. Promise à un jeune homme de l'aristocratie mongole, Namgung, qui a aidé Jin-ha un jour qu'il était attaqué, Sullie doit accepter cette alliance lorsque son amour de jeunesse est apparemment tué lors d'un combat avec son rival.
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La mise en scène de Kim Young-jun est remarquable de maîtrise et d'inventivité. Une fois les quelques invraisemblances narratives acceptées, il faut reconnaître que l'on est impressionné par le traitement cinématographique et visuel du film. Cadrages et angle du cadre, mobilité de la caméra, montage, tout concourt à rendre le spectacle plaisant sans que cela ne tourne à la démonstration technique. La photographie est également remarquable avec une utilisation contrastée de la couleur : densité dans les scènes dramatiques, acidulée dans les quelques séquences surréalistes, natu/(neut)ralité dans les autres. Les combats sont assez correctement chorégraphiés, même si leur visibilité est parfois un peu délicate. L'effusion de sang n'est pas trop forte, remplacée souvent par un effet d'explosion des corps qui laissent échapper des cendres et de la fumée. Deux surprenantes "bottes secrètes" au sabre font partie de l'arsenal Bichun. Enfin la musique est, elle aussi, contrastée : notamment un superbe thème à la flûte d'inspiration traditionnelle et une composition heavy metal rock/guitar virtuoso qui accompagne les scènes de combat.
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L'interprétation est sans faille. Hyun-joon Shin, au visage si particulier, est un Jin-ha puissant et fragile à la fois, la belle Hee-seon Kim incarne une Sullie passionnée et déterminée (le cinéma asiatique permet aux femmes d'être l'égale des hommes dans le combat) très convaincante et Jin-yeong Jeong, qui retrouvera Hyun-joon Shin dans Killerdeului suda, est également un talentueux acteur.
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Pour conclure, bien que n'étant pas spécialiste, voire même amateur éclairé de "wu shu" (films de cape et de sabre fantastiques et câblés), je considère Bichunmoo comme un des meilleurs représentants du genre, supérieur à Wo hu cang long et Ying Xiong, peut-être même à Wong Fei-hung. De plus, le contenu narratif est suffisamment riche et intéressant pour que son réalisateur puisse s'atteler à une saga, une (double ?) trilogie comme Star Wars, avec lequel le film a des points communs, structure de création (ou d'exploitation au choix) à la mode dans le cinéma depuis plus de vingt ans... "You said you want a revolution*, well you know..." ; après J.S.A. et Bichunmoo, dans des genres très différents, elle pourrait venir de Corée !
___
*message subliminal !!

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