mercredi 16 avril 2003

Khartoum


Vision et vanité

Ouverture
La trame historique du film est celle du siège et du combat de Khartoum entre le 12 mars 1884 et le 26 janvier 1885. Cet événement met aux prises Mohammed Ahmed dit le Mahdi (l'attendu) qui lance une insurrection islamiste au Soudan contre l'occupant égyptien et son allié britannique et Charles George Gordon, Major Général de sa Royale Majesté la Reine Victoria, envoyé par le gouvernement du Premier Ministre William Ewart Gladstone, comme Gouverneur du Soudan, pour une simple mission d'évacuation de la population non autochtone. Le choix de Gordon s'imposait pour trois raisons : il était affectivement lié au Soudan et à Khartoum pour y avoir mené une lutte efficace contre l'esclavagisme qui lui valait une reconnaissance presque frénétique de la part de la population locale ; il avait écrasé la rébellion Taiping en Chine (1864) à la tête de la "Ever Victorious Army", gagnant ainsi le surnom de "le Chinois" ; enfin, il était le seul susceptible d'accepter une mission aussi délicate, militairement et politiquement. Inconvénient majeur pour ses mandants : c'est un homme libre, sans souci de sa hiérarchie, un croyant qui "prend ses ordres auprès de Dieu plutôt que de moi" déclare le Premier Ministre Gladstone.
Nous avons donc affaire à une opposition entre deux hommes de foi, ce qui en fait la particulière richesse psychologique et historique.

Intermède
Khartoum est un film en deux actes (avec entracte donc) qui se situe dans la dernière partie de la carrière de son réalisateur, Basil Dearden. Il vient après Doubles masques et agents doubles (Masquerade - 1965 au générique duquel figure Michel Piccoli) et avant Un Trio d'escrocs de 1968. Basil Dearden est un cinéaste (plus qu'un artiste) de qualité, attaché à la précision narrative et aux aspects techniques plus que stylistiques de ses films. Le soin documentaire (très sensible tout au long du film et en particulier dans l'introduction) est manifeste.
On peut dire, dans cette perspective, que le film est une réussite. L'action, sorte de Fort Alamo à l'anglaise, est bien menée, la distribution est de qualité. Laurence Olivier en fondamentaliste islamiste à l'accent "exotique" est, quoique surprenant, assez convaincant. Choisi, entre autres, pour sa prestation dans Les 55 de Pékin (1963), étrange parallèle avec son futur personnage de Gordon, Charlton Heston tient très correctement son rôle, même si en officier-ingénieur anglais, ce n'est pas le meilleur choix (il reste, malgré ses efforts, trop américain). On lui aurait, peut-être, préféré un Alec Guinness, Rex Harrison ou un Peter O'Toole (trop jeune pour le rôle). D'ailleurs, Khartoum n'a pas le souffle épique et légendaire d'un Lawrence d'Arabie, auquel il est souvent comparé. Les rencontres entre Gordon et Mohammed Ahmed, qui n'ont probablement jamais dû avoir lieu, sont les principaux moments forts du film, tant pour leur portée psychologique que pour la confrontation intéressante entre les deux acteurs.

Musique de clôture
Khartoum est un film très plaisant, et ses plus de deux heures ne sont pas un handicap, au contraire. Mention spéciale à la composition musicale de Frank Cordell, bien mise en valeur et dont le thème est une réelle réussite. 

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